Chapitre III:

Champs de travail possibles

 

Comme je l’ai indiqué ma recherche s’articule entre une démarche ethnographique et une recherche action. Je veux donc indiquer ici les nouvelles pistes pour une intégration dans le lien social au Vietnam pour répondre concrètement à l’appel du 44e Chapitre Général.

I- Une  population très jeune

En 1989, selon le recensement général de la population, le Viêt-Nam comptait 64,4 millions d’habitants. En 2001, ce nombre se montait à 78 685 800 en 2001, soit un accroissement de 2,5% par an. La population est très jeune. 33 494 246 de jeunes ont moins de 19 ans. Le pourcentage serait beaucoup plus élevé si l’on établissait la limite d’âge à 30 ans, soit 55% tandis que les personnes âgées plus de 65 ans n’occupent qu’un pourcentage de 3,8% de la population.

Plus concrètement, en fonction de l’âge parmi les jeunes :

1 an                            1 263 599

1-4 ans                       5 908 643

5-9 ans                       9 033 162

10-14 ans                  9 066 562

15-17 ans                  5 204 065

18-19 ans                  3 018 215

20-24 ans                  6 925 387

25-29 ans                  6 925 387

La population est rurale à 81%. Sa densité est importante : 190 habitants par km2. Dans le delta du Fleuve Rouge au nord, elle atteint 1 000 à 1 500 habitants par km2. Leurs ressources principales reposent essentiellement sur la riziculture, constituant la richesse du pays. Dans le delta du Mékong, grâce au temps et au climat favorables, les paysans peuvent cultiver du riz dans des rizières à trois récoltes par an. En 1989, grâce aux bonnes récoltes, le Vietnam a pu exporter un million de tonnes rapportant ainsi 250 millions de dollars, ce qui fait élever le Vietnam au 3e niveau mondial d’exportateur de riz après les États-Unis et la Thaïlande. Les autres ressources vivrières sont le maïs, le soja, le manioc, la patate douce et la pomme de terre. Comme cultures maraîchères, on récolte des choux, des tomates et de multiples variétés de légumes. Les cultures industrielles se composent de l’hévéa, du thé et du café, de l’arachide, des noix de coco, de la canne à sucre, du mûrier, du tabac, du jute et du coton. L’élevage porcin n’est pas moins important. L’accroissement pendant le dernier quinquennat est significatif : 1,8 million de porcs et 1,8 million de buffles et bovins. Grâce à cela, le Vietnam occupe le 11e rang. La pêche de mer et la pisciculture sont également importantes.

La principale ethnie du pays est celle des Viêts, représentant 84% de la population ; elle parle la même langue, le vietnamien. Il existe d’autres groupes ethniques : les montagnards et les chinois qui parlent un dialecte entre eux. Cependant, ils doivent apprendre la langue vietnamienne à l’école, ce qui pose un problème pour un grand nombre d’entre eux. En effet, si les régions plates sont le domaine exclusif des Viêts, l’ethnie majoritaire viêt, dans les plateaux du Centre et les montagnes du Nord habitent cinquante-trois minorités représentant 15% de la population, soit plus de 10 millions d’individus. Depuis toujours, les montagnards aménagent des rizières en terrasses qui dénotent une technologie avancée et donnent, grâce à deux récoltes par an, un rendement important. Les habitations sont le plus généralement construites sur pilotis. Bien que ces sociétés soient dites traditionnelles, elles sont loin d’être figées et leurs coutumes changent avec le temps. Ces montagnes qui les abritent devraient s’ouvrir largement au tourisme ou à l’exploitation et à la globalisation malgré eux.

2- Une jeunesse très dynamique

a) « été vert »

À partir de années 90, le gouvernement a lancé un mouvement nommé « été vert ». Des milliers de jeunes et d’étudiants volontaires répondant à cet appel s’engagent dans différentes activités dans les provinces et villages lointains : cours de vacances d’enseignement général pour les élèves de tout niveau, cours de langues, activités périscolaires ; construction de maisons appelées « maison d’affection » pour des familles pauvres.... Aussi, des psychologues bénévoles partagent la vie des campagnards en les initiant à l’éducation de leurs enfants. Des médecins consultent et distribuent gratuitement des médicaments en formant les gens à l’hygiène médicale. Normalement, le programme est réparti pendant les deux mois des vacances. Ainsi, à tour de rôle, plusieurs groupes d’étudiants assurent la continuité conformément à leur disponibilité (photo, p. 437, 438).

Un bref entretien avec quelques-uns de ces bénévoles révèle l’avantage et la nécessité de cet « été vert ». M. Trân van Thuân, étudiant de la 2e année universitaire, s’est engagé aux cours de vacances pour les élèves du premier cycle à Nha Trang situé à 450 Km de Saigon vers le nord. Selon lui, ses expériences sont enrichissantes et l’aident à connaître ses lacunes pour y remédier.

- Dans quelle région es-tu parti pendant ces vacances ? - À Nha Trang, dans un petit village pas très loin de la ville.

- Quelles sont tes impressions et tes expériences après un mois de stage ? – C’est la deuxième fois que je participe au mouvement de l’ « été vert ». Cette année, je suis responsable de la classe de 6e le matin et de 7e dans l’après-midi, pour la révision des mathématiques et du vietnamien. Les élèves se rassemblent aussi le samedi pour d’autres activités périscolaires : jeux en équipes, pique-nique... En comparant avec l’année dernière, il est vrai que je suis un peu plus habitué à maîtriser la discipline en classe. Cependant, il me faut être beaucoup plus créatif pour trouver sans cesse de nouvelles méthodes d’apprentissage pour aider ces enfants à comprendre les leçons et à les mémoriser. Après quelques mois de vie ensemble avec ces enfants, j’ai pris conscience de la nécessité de l’objectivité, de la dynamique et de la persévérance ainsi que de la vie en équipe. Ce sont leurs qualités positives qui me donnent la force de continuer jusqu’à la fin de mon stage malgré les difficultés rencontrées.

* M. Dinh van Phung, étudiant de la 3e année universitaire, se donne la peine de venir à Camau, dans le delta du Mékong, au sud du Vietnam. Comme la plupart des plaines au sud, la province de Camau est renommée pour ses moustiques et ses barques. Les fleuves s’y enchevêtrent comme une toile d’araignée. Pour aller d’un village à un autre, on utilise une barque, à moteur ou non. Le moyen principal de circulation est la barque. Phung est venu dans un village de 22 000 habitants dont 800 catholiques. Il y a environ 350 handicapés. La principale mission de Phung et des 3 autres étudiants est de donner des cours de révision et de visiter certaines familles pendant ses moments libres.

- Quelques-unes de tes réflexions après le stage ? – Tout d’abord, je vois trop de gens pauvres. La pauvreté économique entraîne souvent celle de l’intellectuel. Sans argent et sans moyen de circulation, très pauvres, un grand nombre d’enfants abandonnent l’école en cours de route. Par exemple, je rends visite à une famille de 4 enfants dont les deux premiers doivent aller travailler pour contribuer au budget familial. Les deux autres petites filles, grâce à l’aide du curé, peuvent continuer leurs études, l’une en sixième, l‘autre au primaire. Tandis que dans une autre famille de 6 enfants, il n’y a qu’un seul enfant qui sait lire et écrire. Leur maison est démolie sans qu’ils puissent trouver de l’argent pour la rebâtir.

Bien que je n’aie pas de moyen efficace, un rêve me poursuit cependant  comment faire pour aider ces gens à sortir de cet état : habitation plus confortable, moyens de déplacement, conditions nécessaires pour pouvoir aller à l’école, pour se distraire... ? C’est-à-dire tout ce qui contribue à la promotion de l’homme : construire des maisons, creuser des puits, remplacer des ponts de bambous par ceux du béton, créer des hospices pour des vieillards et des handicapés... J’espère qu’il y aura des bienfaiteurs au courant de la misère de ces personnes vivant loin de la civilisation actuelle.

* Y-Brôn, un étudiant ethnique qui vient de finir ses études du secondaire, participe aussi à cet « été vert » avec ce même groupe dans cette plaine de moustiques au village de Cây Bôn. Ayant les possibilités de pouvoir poursuivre ses études jusqu’au baccalauréat, Y-Brôn ne voudrait pas s’arrête là. C’est la première fois que Y-Brôn est venu dans ce genre de village retiré. Il n’a jamais imaginé que la misère pouvait y exister et que l’analphabétisme y règne quasi totalement. On y manque de tout.

- Avec des expériences de l’approche de la pauvreté des gens des villages retirés, as-tu quelques propositions ?

– Je me sens vraiment heureux d’avoir l’occasion de vivre au milieu de ces pauvres de cette province de Camau pendant un mois parce que moi-même je suis pauvre et descendant d’une famille pauvre. Mais la pauvreté de ce village est tout à fait différente de celle de mes voisins sur les hauts-plateaux : moyens de circulation difficiles ; chômage de la plupart des personnes âgées et même des jeunes ; analphabétisme général à cause de la pauvreté et de l’accès difficile à l’école, ce qui entraîne du chômage ; pour les cas urgents des malades, il est presque impossible d’aller voir un médecin, surtout pendant la nuit ; sans argent pour acheter des médicaments non plus. Pour la vie spirituelle, l’accès à l’église est très difficile. En face de ces difficultés, on ne trouve pas non plus de personnes compétentes pour les soutenir spirituellement.

Et voici quelques propositions aux bonnes âmes, aux bénévoles :

-         des visites périodiques aux personnes âgées pendant les grandes fêtes de l’année par exemple : Noël, Pâques, jour de l’an, avec des cadeaux en conformité avec les besoins de la vie journalière tels que : vêtements, aliments, riz...

-         organiser des classes de formation professionnelle pour les jeunes : mécanique, électricité, couture, coupe des cheveux...

-         cours de catéchisme pour la préparation du baptême, de la confirmation, de la première communion...

-         consultation et distribution gratuite des médicaments. Si possible, créer un dispensaire.

-         Révision des leçons pour les élèves du premier et second cycle : mathématique, physique et chimie...

* Trân van Tuân, étudiant de la première année universitaire, est parti aussi pour Camau. Cependant, il est venu à un autre village appelé Tân Lôc. Parce qu’il est situé dans une province, les villageois rencontrent presque les mêmes problèmes que les autres. C’est toujours la circulation difficile qui fige les gens dans la pauvreté sans aucun espoir de s’élever dans la vie sociale, surtout par rapport aux pauvres. Tuân partage ses observations.

- Tes impressions et tes propositions après l’ « été vert » ?

– Un très grand nombre de jeunes abandonnent l’école après le primaire parce qu’il faut aller jusqu’à Camau, à 16 Km de Tân Lôc, pour continuer leurs études du premier cycle et qu’ainsi les dépenses dépassent énormément le niveau du budget familial. Les difficultés rencontrées à Tân Lôc sont les mêmes que celles des autres villages de cette province de Camau. En général, le niveau de culture de ces gens est très bas et il leur manque les moyens de se cultiver et de s’élever dans la vie sociale. Des classes d’apprentissage d’un métier leur sont nécessaires : mécanique, soudure, couture... Grâce aux observations et à mes expériences personnelles recueillies après un mois de partage de la vie avec ces villageois au bout de notre pays, je vois une route largement ouverte à un vaste champ de travail pour ceux qui désirent sacrifier leurs compétences au service des pauvres. Personnellement, je me dis de faire un grand effort pour me cultiver en vue de répondre plus efficacement aux besoins de ces jeunes qui ont subi des désavantages depuis des générations. Certains religieux et religieuses y sont implantés. Cependant, ils n’ont les capacités de combler qu’une partie des besoins urgents et il est dommage qu’ils ne puissent penser à d’autres projets à long terme comme la formation professionnelle.

b) bénévolat

Le village Ealủ est situé à 16 km de la province de Pleiku, au flanc d’une montagne. Une école du primaire y est fondée en faveur des minorités ethniques. Elle n’est pas très grande mais assez confortable en comparaison avec les maisons sur pilotis des montagnards. Les élèves sont très pauvres. Parfois ils n’ont pas suffisamment de quoi se vêtir. Une enseignante de la classe du niveau 1, Mlle MAI THI HUONG, épanche ses sentiments : « Quand je fus envoyée à cette école, il y manquait de tout. Complètement découragée, j’ai voulu abandonner mon métier. Mais peu à peu, après des entretiens avec les élèves et leurs parents, j’ai pris conscience que je devais rester ».

En réalité, les difficultés ne prennent pas seulement racine à partir du dénuement matériel, mais aussi du problème provenant de la langue différente et des réflexions discordantes entre l’enseignante et les élèves ainsi qu’entre l’enseignante et leurs parents, ce qui semble le plus difficile dans la mission auprès des montagnards. Ce n’est pas tout. Il y a toujours de nouveaux arrivants dans la classe. Aller à l’école ou rester à la maison, c’est pareil, pensent certains parents. Mlle Miên, enseignante, nous révèle : « Tous les jours, il est immanquable qu’il y ait au moins un élève nouveau. Aujourd’hui il vient en classe et je n’ai pas encore eu le temps de mémoriser son visage qu’il a déjà disparu. Et après quelques jours ou quelques mois d’absence, il revient. Le gronder ? Je n’applique pas encore cette manière. Par contre, il faut le traiter avec amour en “l’ invitant” à venir en classe. »

3- Niveau de culture de la jeunesse

Selon le recensement général de l’office central en 2001, la population au-dessus de 10 ans a atteint le nombre de 60 117 769 individus parmi lesquels 54 746 873 savent lire et écrire et 5 351 918 sont analphabètes. Mais le désavantage poursuit toujours les gens des provinces. Parmi le nombre des illettrés, 4 644 138 sont des gens de la campagne. Il n’y a que 707 780 individus qui vivent dans la ville.

Les jeunes analphabètes de 10 à 30 ans atteignent le nombre de 1 718 683 individus dont 188 932 vivent dans la ville et 1 529 751, dans la campagne. Le nombre des personnes qui ont besoin d’être alphabétisées n’est pas minime.

Les statistiques selon l’âge, ci-dessous, peuvent faciliter la compréhension :

Age

(1)

Total

(2)

Savoir lire et écrire

(3)

Analphabète

(4)

Indéfini

(5)

10-14 ans

9 066 550

8 673 320

390 440

2 790

15-17 ans

5 204 060

4 955 200

248 030

830

18-19 ans

3 018 210

2 826 860

190 610

740

20-29 ans

13 493 550

12 601 200

889 590

2 760

Grand Total

30 782 370

29 056 580

1 718 670

7 120

N.B. Total (2) = (3) + (4) + (5)

Grand Total = addition da la colonne (2)

Selon le recensement officiel en 2001, le tableau suivant montre la situation des jeunes à l’âge scolaire qui poursuivent leurs études ou ne viennent plus à l’école :

Age


 

(1)

Total de la situation de la Population

(2)

En train d’aller à l’école

(3)

Ne plus venir à l’école

(4)

Ne jamais venir à l’école

(5)

Indéfinis


 

(6)

 

69 150 931

18 840 764

43 415 437

6 891 873

2 857

5 ans

1 682 306

339 654

3756

1 338 896

0

6-9

7 350 836

6 428 883

80 499

839 825

1 649

10

1 776 096

1 656 873

51 653

67 210

360

11-14

7 290 466

6 068 539

956 455

264 809

663

15-17

5 204 065

2 797 122

2 192 249

214 686

8

18-19

3 018 215

800 088

2 052 286

165 775

66

20-29

13 493 561

652 960

12 067 432

773 065

104

N.B. Total de la colonne (2) = (3) + (4) + (5) + (6)

Observation : La plupart des gens qui sont en train d’aller aux études appartiennent à la catégorie des jeunes. Il n’y a que 96 645 étudiants au-dessus de 30 ans.

Normalement à l’âge de 5 ans, les enfants commencent à fréquenter les classes maternelles. Mais il n’y a que 20,18% qui bénéficient de cet avantage. Nombreuses sont les raisons par lesquelles on les gardent à la maison : soit du fait du manque de salles de classes, soit par ce qu’étant pauvres, la scolarité des classes privées dépasse les moyens des parents.

Les enfants de 6 à 10 ans doivent être à 100% en classe du primaire selon les recommandations des autorités. Mais selon ces statistiques, plus d’un million d’enfants ne vont pas à l’école ou l’abandonnent, soit 88,59% d’enfants qui possèdent la possibilité de fréquenter l’école. La plupart de ces enfants habitent loin de la ville, dans les villages lointains et retirés, sur les hauts-plateaux et évidemment ils appartiennent à des familles en difficulté financière.

Les enfants de 11 ans à 14 ans sont à l’âge de ceux qui poursuivent leurs études du premier cycle. Mais ce nombre n’atteint que 83,23%. De 15 ans à 17 ans, second cycle, 57,74%. De 18 à 19 ans, étudiants de la première et de la deuxième année universitaire, 29,5%. Et le pourcentage des étudiants au-dessus de 20 ans ne monte qu’à 4,83%.

Pourquoi des enfants à l’âge scolaire ne fréquentent-ils pas l’école ou l’abandonnent-ils en cours de route ? La principale raison est facile à comprendre, c’est la pauvreté. Ces enfants doivent quitter l’école et entrer tôt dans la vie pour aider leur famille. Les villages lointains manquent d’écoles. Mais aussi certains ne sentent pas la nécessité de savoir lire et écrire ou pensent que les femmes n’ont pas besoin de s’élever dans les études parce qu’elles seront très difficiles à se marier. C’est pourquoi, le nombre des filles qui ne vont pas à l’école est presque le double de celui des garçons : 4 334 296 filles / 2 557 577 garçons.

Sans compter les enfants qui n’atteignent pas l’âge de la scolarité primaire, le niveau d’études des citoyens vietnamiens reste très bas : presque la moitié de la population a fini leurs études du primaire, une autre moitié, après le cycle du secondaire. Il n’y a que 2,06% qui ont terminé leurs études universitaires.

Citoyens au-dessus de 5 ans

69 150 931

pourcentage

Ne pas aller à l’école

6 891 873

9,96%

Primaire

25 538 581

36,93%

Premier cycle

20 255 574

29,29%

Second cycle

14 428 591

20,8%

Ecole Supérieur (Bac + 2)

555 058

0,80%

Université (Bac + 5)

1 424 910

2,06%

Université (Bac + 7)

44 068

0,06%

indéfini

7 995

 

Concrètement, en examinant le niveau d’études selon l’âge de ceux qui viennent à l’école et de ceux qui l’ont abandonnée, nous avons ce tableau :

 

Niveau de classe

En train d’aller à l’école

Ne plus aller à l’école

1

 2 450 091

512 589

2

2 180 471

2 075 620

3 (

2 090 205

3 324 700

4 (CM1)

1 928 792

3 520 634

5 (CM2)

1 813 894

5 631 227

6 (sixième)

1 677 391

3 021 127

7 (cinquième)

1 383 716

4 174 819

8 (quatrième)

1 305 556

8 692 965

9 (troisième)

1 205 106

3 626 709

10 (seconde)

780 178

1 298 952

11 (Première)

626 041

933 769

12 (Terminale)

809 628

5 148 208

indéfinis

2 209

2 071

Observations : La plupart des gens qui viennent à l’école appartiennent à la catégorie des jeunes en âge scolaire. Mais le nombre des enfants qui l’abandonnent en cours de route est assez élevé : 2 450 091 élèves du niveau 1, il n’en reste que 809 628 en classe terminale, soit 33%.

Les jeunes de tout le pays qui ont fini leurs études secondaires ne représente qu’un pourcentage très modeste : 5 957 836 soit 7,8% de la population. Ce pourcentage n’est pas très encourageant en comparaison avec les autres pays.

4- Mon environnement

Malgré le déclenchement du programme « éliminer la famine, diminuer la pauvreté » de l’État, la richesse de Ho Chi Minh-Ville n’est qu’apparente. Plus de la moitié de la population saïgonnaise vit encore dans la pauvreté. Le fossé entre les nouveaux riches et les pauvres s’est creusé de plus en plus profond. Derrière la façade luxueuse se cache la misère des habitants du quart monde.

A- Quartier TÂN KIÊNG

1- Vue générale du quartier TÂN KIÊNG[1]

Le quartier TÂN KIÊNG est l’un des 10 quartiers du 7e arrondissement de Ho Chi Minh-Ville qui dans, le programme d’urbanisation, a été détaché de l’arrondissement de NHA BE en 1997 (photo, p. 430).

TÂN KIÊNG est un quartier où se cachent un grand nombre de fléaux sociaux. Une des raisons pour classer TÂN KIÊNG dans cette catégorie, vient de ce que pendant l’époque de stabilisation d’un nouvel arrondissement, il reçoit facilement des gens de toutes sortes de classes sociales qui viennent s’y abriter. Ne pouvant trouver suffisamment de quoi vivre dans les provinces, de plus en plus de vietnamiens sont attirés par Saigon. La désillusion est cruelle. La plupart d’entre eux ne possèdent aucun métier spécialisé, et sont normalement peu instruits. Aussi, ils acceptent de faire n’importe quoi pourvu qu’ils gagnent de l’argent : marchands ambulants, maçons, porteurs, tailleurs, cyclo-pousse, cireurs de souliers, mendiants et même voleurs à l’occasion… Leurs enfants ne peuvent pas aller à l’école évidemment. Du fait de ce contexte social complexe, le quartier TÂN KIÊNG devient un point crucial de la ville qui attire l’attention de plusieurs organisations sociales.

2- Quelques caractéristiques

a) situation géographique et population

Avec une superficie de 99,96 hectares, longeant du canal de Kinh Te, une branche du fleuve de Saigon, le quartier TÂN KIÊNG est divisé en 4 secteurs se composant de 76 groupes d’une population de 16 822 habitants dont 4 989 individus sont venus des provinces (des immigrés), soit 40%, un pourcentage assez élevé ; 3 452 enfants au-dessous de 16 ans parmi lesquels 1 706 sont des filles.

b) vie économique

TÂN KIÊNG est considéré comme un quartier pauvre du 7e arrondissement. Comme mentionné plus haut, 40% de la population du quartier TÂN KIÊNG est venu d’un autre lieu. Peu instruite et sans aucun métier spécialisé, le travail de cette catégorie se concentre sur ceux qui ne demandent pas de spécialité : marchands ambulants, maçons, porteurs, tailleurs, cyclo-pousse, cireurs de souliers… qui donnent pourtant un revenu pas assez élevé et peu stable. Le taux de chômage des adolescents dans ce quartier est assez élevé : 20%. En tout cas, si quelqu’un se donne la peine de travailler, il peut trouver le nécessaire pour vivre au jour le jour (photo, p. 435).

Sur toute l’étendue du quartier, on peut compter 66 bureaux de différentes Compagnies, un port de voie fluviale et un marché. Trente familles travaillent dans un des Services, 39 autres dans les entreprises. L’objectif des autorités locales pour 2004-2010 est d’éliminer la pauvreté de toutes les familles qui gagnent au-dessous de 40 USD par personne/par mois.

c) infrastructure

Les principales rues sont goudronnées, l’eau et l’électricité installées. Le quartier TÂN KIÊNG possède un établissement du 3ème cycle, deux du second cycle, et deux du primaire. En plus, 5 écoles maternelles, 3 classes d’affection et un foyer pour les filles victimes d’abus sexuel répondent aux besoins culturels des jeunes.

d) religion

La plupart des habitants sont venus d’ailleurs, leurs religions sont donc très variées et ils ont des pratiques suivies. Cependant, comme dans tout le Vietnam, les bouddhistes sont en majorité. Il y existe 2 Églises catholiques, une Chapelle des Protestants, 3 pagodes et 4 temples.

e) point de « culture »

Comme dans tous les autres quartiers de la ville, des points de Karaoké, et d’accès à l’Internet au quartier TÂN KIÊNG attirent pas mal de jeunes, ce qui est considéré par les gens comme sa « culture multiforme et caractéristique».

f) éducation

Selon les statistiques officielles des autorités du quartier, avec 2 écoles du primaire, deux du premier cycle et un du second cycle, le quartier TÂN KIÊNG répond suffisamment aux besoins des jeunes en âge scolaire. Cependant, il n’y a que 81,7% qui terminent le premier cycle, c’est-à-dire 18,3% de ces jeunes qui ont abandonné l’école en cours de route. À côté de cela, il reste toujours des enfants qui ne fréquentent aucune école. Normalement, ce sont des enfants des familles pauvres, de celles qui viennent des provinces. Pour résoudre ce problème, ont vu le jour des classes d’affection qui accueillent environ 200 enfants. Il faut savoir que les statistiques officielles ne comptent que les personnes qui habitent officiellement dans le quartier, c’est-à-dire dont les noms sont inscrits dans un livret de famille. Les familles, venues des provinces, qui s’y installent temporairement, ne sont pas considérées comme habitants de ce quartier. Leurs enfants ne bénéficient pas du tout des droits qui leur sont dus. On ignore parfois leur présence pourtant réelle dans ce quartier. Sans un acte de naissance, ils ne peuvent évidemment pas venir à l’école. Des agents sociaux doivent aller les chercher dans les hameaux perdus au milieu de chaumières construites temporairement pour éviter le soleil et la pluie et insistent auprès de leurs parents pour qu’ils les laissent venir à ces classes d’affection. D’un certain point de vue, les statistiques officielles, donnant un chiffre parfait de 100% d’enfants du quartier qui vont à l’école, ne reflètent pas la situation concrète des jeunes à l’âge scolaire dans ce quartier. D’ailleurs la participation obligatoire du mouvement d’émulation ne permettrait pas aux responsables de publier cet « abcès » de leur territoire.

3- Vie sociale

Le 7e arrondissement en général et le quartier TÂN KIÊNG en particulier est un environnement social assez complexe. Le problème de l’exode rural en est une cause. En plus, le port de communication fluviale avec des stations, des dépôts multiples attire beaucoup de gens, des travailleurs de toutes sortes, des porteurs, des tricycles, des poids lourds... à n’importe quel moment de la journée, même pendant la nuit. À part de ces travailleurs « honnêtes », ces ports sont aussi un abri pour les immigrants illégaux, les toxicomanes, les prostituées, les joueurs de cartes... sources de nombreux fléaux sociaux que les autorités locales ont du mal à résoudre.

Concrètement, en l’année 2003, pour en faire diminuer ces conséquences, les autorités ont forcé 75 toxicomanes à entrer dans des camps de « concentration ». Dans un futur proche, 119 autres visés suivront leurs pas. Ces toxicomanes sont ceux que les autorités ont repérés ou qui ont été déclarés par leur famille. Mais bien sûr, il reste encore d’autres qui se cachent et qui n’apparaissent qu’au « moment propice » pour perturber les gens. Une situation à signaler et à alerter est que parmi ces toxicomanes, on découvre 38 enfants et 3 adolescents ! 70 autres enfants sont également suspects. Ce nombre est très élevé par rapport aux adolescents tandis que la prostitution devient de jour en jour plus variée, plus complexe et très difficile à contrôler. Des voleurs, pickpockets, escrocs... sont des phénomènes de tous les jours. Des bandes de petits voleurs sévissent dans le 7e arrondissement.

4- ce qu’on peut faire dans le domaine de l’éducation

- créer un emploi stable en créant des centres de formation professionnelle : informatique, couture, broderie....

- éducation à l’hygiène pour vivre et garder un environnement sain sans jeter n’importe où les ordures, dans la rue, dans les fleuves... en créant des centres médicaux pour consulter et distribuer gratuitement des médicaments aux pauvres, en leur expliquant pourquoi on a besoin de garder l’hygiène...

- éducation à la civilité, aux valeurs humaines pour lutter contre le vol, la prostitution, la vente de la drogue, l’abus sexuel...

Voilà un des quartiers démunis à Ho Chi Minh-Ville où l’on imagine l’horizon de gratte-ciel qu’offre et offrira le centre de cette métropole depuis la tentative de « Renouveau » en 1986, surtout pendant ces dernières années où tout le Vietnam s’empresse de faire partie de WTO. Pourtant, derrière sa façade luxueuse, se cache la misère des gens se fourrant dans des taudis.

B- Hameau des malades de néphropathie[2]

Des rangées de taudis bas, misérables et humides, retirés dans la petite ruelle de Côt Co, en face de l’hôpital Bach Mai (Hà Nôi) sont l’habitation de plusieurs patients de néphropathie à la dernière étape qui subissent une épuration périodique pour prolonger leur vie. Chacun vient d’un milieu différent avec une situation de vie différente, mais ils ont tous un point commun c’est de s’empresser d’aller chercher de l’argent pour arracher leur vie de la Mort.

Nguyên Hông Công, étant une très intelligente étudiante, espèrait un avenir baigné de lumière. Mais tout semble bouleversé au moment où le docteur lui annonce cette maladie de néphropathie à la dernière étape. Depuis ce jour-là commence une lutte permanente pour maintenir en vie cette jeune fille. Née à Bac Giang (nord Vietnam) sans connaître son père décédé en 1979 pendant la guerre au nord lorsqu’elle était âgée de 3 mois. La maladie a « inscrit » Mlle Công à la « famille » du « hameau de néphropathie » il y a 7 ans. Les gens appellent sa maladie et celle de ses voisins, « maladie des riches », parce que le coût du traitement est extrêmement élevé. Chaque malade doit se rendre à l’hôpital 3 fois par semaine pour l’épuration du rein et chaque séance dure 3 heures pour prolonger la vie. Le prix de chaque épuration coûte 300 000 VND, soit 20 USD. Il n’y a pas de graves problèmes pour les patients qui possèdent la sécurité médicale. Mais, pour ceux qui n’en ont pas, un très grand problème se pose.

Mlle Công possède la carte de sécurité médicale. Une partie du problème est résolue. Mais il faut de l’argent pour acheter les autres médicaments nécessaires pour l’épuration, environ 30 000 VND (2 USD). Autres dépenses : 20 USD pour le loyer et pour la nourriture et les multiples petites dépenses... Depuis le jour où a commencé la maladie de Mlle Công, ses parents ont vendu leur propre maison pour s’occuper d’elle. Toute la famille s’abrite chez la grand-mère tandis que Mlle Công accepte de prendre soin des malades dans son « hameau » et gagne 12 000 VND (0,8 USD) par jour pour s’acquitter des dépenses journalières.

Dans ces taudis de cet « hameau de néphropathie » habitent environ 100 familles des patients de l’hôpital Bach Mai. Un des spectacles est à signaler : le cas de la famille de M. Hiêu. En réalité, cette famille ne se compose que du père et de son fils nommé Hung qui a été atteint de cette maladie quand il fréquentait le niveau 7 de l’école dans son village de Câm Thuy, province de Thanh Hoa (nord-Vietnam). Depuis bientôt 10 ans, cette famille a choisi cet hameau comme milieu natal. La dépense pour prodiguer des soins à son enfant est très élevée. Tout l’ameublement de sa maison s’en va l’un après l’autre. Lui et son fils doit faire n’importe quel métier pour vivre : vendeur de cartes, réparation de bicyclettes, ménage, soin des malades... Le père a trouvé enfin un « métier » qui semble stable : faire bouillir de l’eau et la vendre aux malades dans l’hôpital. M. Hiêu a fait ses confidences : « j’ai vécu ici depuis une dizaine d’années. Même les riches, s’ils sont atteints de cette maladie, deviennent pauvres finalement. »

Dans cet « hameau d’épuration du rein », de temps en temps une personne dit « adieu » à ses voisins. Mme Ganh par exemple, qui y est restée pendant 2 ans, est retournée dans son village à Thai Binh pour attendre l’arrivée de la Mort parce que son budget est épuisé.

C- L’ombre du parc public[3]

Les autorités de la ville de Hà Noi ont dû puiser des milliards de dôngs vietnamiens pour draguer des canaux, embellir les parcs publics, créer des parterres... Mais juste à ces endroits, des fléaux sociaux tels que vols, drogue, prostitution.... ne sont pas encore extirpés (photo, p. 431). Les théories sur la déviance produites entre autres par l’École de Chicago, indiquent que toute déviance a un double caractère de trouble public mais aussi de quête identitaire personnelle. Ici j’insiste sur la déviance comme dérangement non d’un ordre social particulier mais comme fait destructeur du lien social.

Sur les bancs en pierre du portail du lac Bay Mau appartenant au parc Thông Nhât, dans la rue Lê Duan, Hà Noi, se couchent recroquevillés des pickpockets qui attendent la nuit tombante. Pendant la journée, ils dorment comme un mort, yeux vitreux par manque de la drogue, mais qui deviennent aigus comme ceux de l’aigle à la tombée de la nuit. Les personnes visées sont des couples. La scène commence à partir de 19 h 30  environ. Plusieurs couples viennent au parc et s’assoient sur ces bancs en pierre. Les picpockets viennent sournoisement et détroussent habilement les portefeuilles. Ils sont environ une dizaine d’errants divisés en deux catégories : des toxicomanes qui ont besoin d’argent pour calmer l’accès et des voleurs proprement dits qui vivent au jour le jour. Ils vont et viennent, disparaissent et réapparaissent, d’un air véreux et perfide, ce qui fait peur aux gens. Selon ce que racontent les victimes, ils ne « travaillent » jamais isolément. Un jour, un type a réussi à chiper un portefeuille mais il est décelé par le propriétaire qui court tout de suite à sa suite. Cependant, un groupe de ses 5 compères, aussi rapides que lui et dont on ne sait d’où ils viennent, lui barrent le chemin.

De même le zoo de Ho Thu Lê, à Ha Noi, est devenu depuis quelques années, un repaire des fléaux sociaux. Il est bien pacifique pendant la journée. Mais à la nuit tombante, les ombres sont favorables pour les couples mais aussi la « terre sainte » des voleurs, des détrousseurs, des piqûres, de la prostitution...

Il semble que les voleurs, toxicomanes, prostituées... convergent vers les parcs et autour des fleuves de plus en plus nombreux. Le lac NGOC KHANH est l’un des lacs les plus beaux. Le matin, il n’y a personne. Mais de 11 heures à 12 heures, un « marché » de la drogue pousse subitement. Et des toxicomanes se donnent mutuellement des piqûres publiquement. Ce « marché » vient de naître depuis peu. Sans l’intervention des autorités, il se développera comme celui du lac Thien Quang.

Il y a 3 points de divertissements que les gens surnomment depuis longtemps « cimetières dépendants». Ce sont le lac Thien Quang, le lac Bay Mâu et le lac Thanh Nhàn. Tous les jours, au moins une dizaine de filles, s’assoient sur les bancs en se maquillant, mais, dans leurs poches, s’entassent une trentaine de seringues pleines. Chaque seringue coûte de 2 à 4 dollars américains.

Ha Noi possède plusieurs endroits pour se divertir mais ce loisir est remplacé peu à peu par des fléaux sociaux.

D- Vers les campagnes

1) PHUOC HA, un village misérable

Situé à une distance de quelques dizaines de kilomètres de Phan Rang au sud du centre du Vietnam, la route pour y accéder est goudronnée comme il faut et pourtant, PHUOC HA est un village très pauvre (photo, p. 432).

PHUOC HA était une base de la résistance et il est couronné du « titre héroïque » de l’armée depuis 1988 parce qu’il a contribué énormément à la « libération » du peuple. Mais après une trentaine d’années de révolution, PHUOC HA reste toujours un village spécialement en difficulté de l’arrondissement Ninh Phuoc, province de Ninh Thuân. Tout le village a 2 800 habitants vivant dans 6 hameaux. 95% de la population appartient au peuple des minorités ethniques Raglei. Le revenu annuel d’une personne est de 10 dollars. Le chef du village fait des confidences : « Quand le Ciel donne la pluie, les villageois peuvent planter du maïs, nous n’avons pas faim. S’il ne pleut pas, nous manquons de nourriture pendant 2 à 3 mois. Il y a 256 maisons en paille dont 66 sont construites en briques. Mais après la construction, il ne leur reste plus rien, car ils doivent vendre leur terre ou leurs bœufs pour construire la maison (photo, p. 433) .

2) Village de Cây Bôn, province de Ca Mau

a) Vue générale

Le village de Cây Bôn est situé au sud du Vietnam appartenant à la province de Ca Mau. Les fleuves y sont enchevêtrés. Aussi, le moyen de circulation dans cette région est la barque. De Ca Mau à Cây Bôn, il faut une heure et demie par voie fluviale.

Cây Bôn se compose de 22 000 habitants dont 800 sont catholiques. La plupart des autres conserve le « culte des ancêtres ».

b) Vie économique et culturelle

L’agriculture tient comme toujours la place principale. Au cours de ces dernières années, on a remplacé la culture du riz par celle des crevettes. Mais, environ 20% de la population de cette région ne possède aucun terrain à eux pour s’installer. Ils s’engagent au travail journalier pour vivre au jour le jour. Les chômeurs sont nombreux pareillement. Une partie des jeunes gens et jeunes filles travaillent dans les entreprises à enlever le test des crevettes sur place ou quittent leur village pour se rendre dans les grandes villes.

La plupart des habitants vivent dans des chaumières parfois pleines de trous. La pauvreté économique entraîne la pauvreté intellectuelle. Des familles ne peuvent pas se procurer l’essentiel pour la nourriture. Où trouver l’argent pour envoyer leurs enfants à l’école ? Une famille, par exemple, a quatre enfants dont les 2 premiers garçons doivent abandonner l’école en cours de route, faute d’argent, les 2 petites filles suivantes peuvent continuer leurs études, grâce à l’aide de la paroisse. Une autre famille a six enfants dont un seul sait lire et écrire. Les 5 autres acceptent leur situation d’analphabétisme. La maison s’est effondrée sans que l’on ait de l’argent pour la réparer. Aller à l’école est alors considéré comme un luxe par cette famille parfaitement démunie. Les élèves qui poursuivent leurs études du premier cycle sont peu nombreux, soit parce que l’école secondaire est très loin, soit parce que le moyen de circulation est  difficile, uniquement par barque. Toutes les familles ne possèdent pas pourtant une barque. Il semble qu’il soit rare qu’un jeune termine ses études du second cycle. D’ailleurs, surtout les filles, elles ne possèdent pas de motivation suffisante pour continuer leurs études en pensant que les filles cultivées trouvent difficilement un mari dans ce village. En fin de compte, la raison principale de l’abandon de l’école reste toujours la pauvreté. Certains, âgés de 10 ans, fréquentent la classe du niveau 1. Certains autres en ont déjà 15 et suivent les classes du niveau 3.

c) Santé

Dans cette région, tout est jeté dans le fleuve. Les lieux d’aisance se trouvent au bord des fleuves. Des familles qui n’ont pas de puits creusé prennent de l’eau sale et boueuse dans ce même fleuve pour leurs besoins journaliers. De là, des maladies dangereuses s’ensuivent. La plupart des familles ont des jarres pour prendre de l’eau de pluie. Mais s’il ne pleut pas ou s’ils n’ont pas suffisamment de jarres pour contenir de l’eau, et c’est le cas général, où trouver de l’eau ? Dans le fleuve évidemment !

d) Ce qu’on pourrait faire

Premièrement : visite des familles pauvres pour partager avec elles le nécessaire.

Deuxièmement : formation professionnelle pour les jeunes.

Troisièmement : consultation et distribution des médicaments.

Quatrièmement : cours de rattrapage.

3) Village de Châu ro.

Châu ro est une tribu des minorités ethniques au sud du Vietnam. Ce village est divisé en 10 hameaux. Voici quelques détails de certains hameaux les plus pauvres :

Hameau 7 et Hameau 8 sont deux quartiers les plus retirés du district de Xuan Loc, province de Dong Nai, à 100 km de Saigon (photo, p. 434).

a) Superficie et infrastructure:

Chaque hameau couvre une étendu de 15 à 20 hectares. La population est clairsemée, la voie de circulation difficile, boueuse pendant la saison de pluie et poussiéreuse pendant la saison ensoleillée. Le moyen de circulation repose sur la bicyclette et sur celle qui est aménagée pour porter des marchandises.

b) Population :

Hameau 7 comprend 13 familles avec 83 individus ; Hameau 8, 38 familles avec 159 personnes. La terre est aride, une grande partie se compose de sable blanc où peuvent pousser seulement les anacardiers et le manioc, ce qui influe énormément sur la vie des habitants.

c) Vie familiale :

Leur métier principal est d’engager son travail journalier. La terre à exploiter est minime par rapport à la culture du manioc ou de l’anacardier qui demande une superficie vaste pour un rendement suffisant. Les dettes se superposent. Ils peuvent trouver irrégulièrement environ 2 USD. Leurs enfants vont garder les bœufs et les buffles pour un particulier, ou chercher quelques escargots et souris... sans rien faire autre chose et évidemment, aller à l’école pose un grand problème pour la famille.

e) Religion :

La plupart des habitants du Hameau 7 sont sans religion. Quelques familles sont catholiques ou protestantes. Particulièrement, celles du Hameau 8 n’adoptent aucune religion.

f) Niveau culturel :

Leur niveau d’études est bas. Un grand nombre ne sait pas lire et écrire. Beaucoup de jeunes ne finissent pas le cycle du primaire ou tout au plus terminent ce niveau. La principale raison qui entraîne cette situation est la pauvreté et le moyen de circulation difficile. Il n’existe pas d’école dans ces quartiers. Les enfants doivent faire de 5 à 10 km pour fréquenter même le niveau 1 du primaire.

g) Vie quotidienne :

La question d’hygiène est effacée. Il n’y pas de source d’eau propre. Deux ou trois puits publiques ne sont pas suffisants surtout pendant la saison sèche. Les manques de nourriture et d’hygiène n’assurent pas une bonne santé.

h) Ce que l’on pourrait faire :

Comme la situation de tous les villages des minorités ethniques au Vietnam, cette approche du terrain laisse voir un peu leurs besoins plus ou moins communs dans presque tous les domaines : des besoins urgents à court terme tels que l’aide de nourriture, des médicaments, des moyens de circulation ainsi que ceux à long terme tels que l’éducation à l’hygiène, à la santé, à la manière possible d’élever le niveau de vie, et si possible de fonder une école du primaire sur place pour éliminer ainsi une des causes pour laquelle les enfants ne vont pas à l’école.

4- Histoire d’un village pauvre

Le sud du Viêt Nam est renommé pour sa richesse, une contrée fertile en riz et pourtant, il y existe des gens vivant dans la misère la plus profonde.

Sans aucun morceau de terre, le sang est la seule propriété de ces villageois. Dans certaines familles, les deux parents vont vendre leur sang. La vente du sang est un « mouvement » dans ce village de la région de DA HOA, District de CHAU THANH, province de TRA VINH (au sud du Vietnam).

Dans une chaumière, madame Thach Thi Rach fait ses confidences : « Notre famille ne possède aucun morceau de rizière et pourtant a sept enfants. Leur père et moi, nous ne pouvons pas compter combien de fois nous avons vendu du sang pour entretenir la vie ». Une vieille dame continue : « Toute la famille doit aller travailler pendant toute l’année sans avoir gagné suffisamment pour nourrir toute la famille. Mon fils va donc vendre son sang. Au début, une fois par mois, maintenant, deux fois par mois ». Mais actuellement, il est tombé malade et « ne peut plus le vendre car l’hôpital a retiré sa carte ».

Cependant, le cas de Mme Si Dinh est à mentionner. Selon ce qu’un marchand raconte : « elle a abandonné son mari et prend soin toute seule d’une mère vieille et ses deux enfants encore petits. Sa mère est tombée malade. Sans argent, sans terre pour cultiver, sans être embauchée, étant acculée à une impasse, elle va vendre son sang pour soigner sa maman et nourrir toute la famille. Mais enfin, sa force est épuisée après plusieurs ventes consécutives de son sang sans oser se fortifier par des aliments nourrissants. Elle a quitté le monde en laissant derrière elle des soins inachevés. Les voisins ayant pitié de cette famille, prennent la responsabilité de s’occuper de la mère, mais eux-mêmes, ils sont aussi pauvres et doivent vendre leur sang pour vivre ».

Selon les statistiques des autorités locales, ce village se compose de 541 familles dont 210 (284 individus) vivent par la vente du sang. Les conditions naturelles si rigoureuses et la famille nombreuse sont la cause principale de la pauvreté et l’abandon de l’école[4].

5- Marché des travailleurs...

À 4 heures du matin, au moment où la plupart des habitants de la ville de Vinh Long (au sud–VietNam) dorment encore d’un bon sommeil tandis que dans le brouillard matinal, au carrefour d’un fleuve appartenant au village Nhon Phu, district Mang Thich, province de Vinh Long, remue déjà une foule nombreuse d’hommes et de femmes et d’enfants qui s’asseyent des deux côtés du fleuve en attendant l’arrivée d’une certaine barque. Ce sont des porteurs de briques « amateurs ». Je dis « amateurs » parce que ces gens y viennent de leur gré, sans contrat, sans embauche, rien du tout. Leur « outillage » est très simple : un cadre en bois de 70 cm de longueur et une serviette à carreaux. Voilà une barque qui accoste le « quai ». Quatre ou cinq jeunes gens sautent dans la barque. Et ainsi de suite. Une barque abordée, la foule diminue et jusqu’à 7 heures du matin, ce « marché » reprend sa tranquillité campagnarde. Après le travail, chacun reçoit l’argent directement selon le nombre de briques transportées : 8 000 dongs pour 1 000 briques transportées du four à briques à la barque. Chaque jour, chacun peut se procurer de 70 000 à 80 000 dongs soit environ 5 à 6 dollars américains. M. HAI TÂM fait ses confidences en montrant ses mains : « Après le premier jour de travail, mes mains sont complètement égratignées tandis que ma femme n’a pas pu faire téter son enfant » (photo, p.435).

Les gens du village sont au courant de l’existence de ce marché depuis les années 60 et il persiste jusqu’à ce jour mais il est vraiment « tumultueux » depuis le début des années 90 où se sont multipliés environ 80 fours à briques qui attirent aussi des barques venues des autres provinces. Ces fours ont résolu le problème du travail pour 3 000 habitants mais il en reste encore 2 000 qui restant chômeurs, forment le marché de vente de la main d’œuvre de force caractéristique de la plaine du fleuve du Mékông.

La plupart des participants de ce marché ne possèdent aucun terrain à cultiver. Pour trouver de quoi manger, ils sont obligés de chercher la nourriture par leur propre force. Mais ce qui frappe le plus aux yeux des gens venus d’ailleurs, c’est qu’un grand nombre d’enfants abandonnent en cours de route leurs études pour participer à ce marché de travail. Après le niveau 6 du premier cycle, ces enfants ne vont plus à l’école pour aller travailler devenant ainsi petits porteurs des briques. Un enfant peut contribuer au budget familial de 2 à 3 dollars par jour. À quoi ça sert « aller à l’école » ?

E- Des toxicomanes

Selon les informations du gouvernement vietnamien publiées dans l’émission de la radio en 2003, le nombre des personnes dépendantes de la drogue a augmenté de 25%, soit 142 000 personnes. 25 453 d’entre elles sont incarcérées dans les différents camps de rééducation. Plus de 67% des toxicomanes sont au-dessous de 30 ans.

Une autre source publiée par Doris Buddenberg représentant de l’Organisation des Nations Unies au Vietnam : « Aujourd’hui, il y a 101.035 personnes dépendantes de la drogue parmi lesquelles, 10.838 toxicomanes sont incarcérés dans les différents camps de rééducation, 1.609 élèves et étudiants et 4.799 enfants. »

Que ces statistiques ne soient pas pareilles, peu importe ! Le signal d’alarme est déjà sonné : l’utilisation de la drogue ayant pour origine de l’opium au Vietnam s’étend peu à peu des adultes à des gens de plus en plus jeunes, des personnes des grandes villes aux gens des provinces, sur les hauts-plateaux… ; et surtout de l’opium à l’héroïne. Depuis peu de temps, apparaissent des drogues globales, des excitants sous forme d’amphétamine (ATS), qui commencent à influencer les jeunes. L’usage de la drogue par injection en utilisant le même seringue est déjà généralisé, ce qui rend la situation de la contagion du virus HIV/SIDA de plus en plus sérieuse : une estimation de 65,3% des toxicomanes infectés par le virus HIV dans tout le pays à cause de l’utilisation de la seringue commune. La recrudescence du crime va de pair avec celle des toxicomanes. Selon les statistiques officielles, 90% d’infraction au vol, à l’homicide, au brigandage… provient de personnes dépendantes de la drogue.

Le 17 août 2007, le gouvernement a organisé un forum sur l’évaluation du succès de réhabilitation de la dignité des toxicomanes et du système de sevrage dans les différents centres. Selon le rapport du comité de prévention de contamination du SIDA, de la drogue et de la prostitution pendant la période de 2001-2006, 235 000 toxicomanes sont sevrés dans tout le pays. Cependant, le pourcentage des cas récidicifs est assez élevé, de 70-80%. Le vice-ministre du Service du Travail et des Invalides Dam Huu Dac a mis au courant aussi que le gouvernement investit dans ce domaine d’une somme de 40-50 milliards de dongs, soit environ 3 millions dollars américains. Mais il n’a que 58 000 toxicomanes qui en bénéficient [5].

a)       toxicomanes dans l’école

Le Service de l’Éducation de la province de Nghe An a publié le matin du 3 mars 2006, que pendant les 5 années passées, on a découvert 213 personnes du cadre, enseignants, élèves, étudiants dépendants de l’héroïne, avec le pourcentage suivant : élèves et étudiants : 72,3% (154 cas) ; cadres et enseignants : 27,69% (59 cas). En particulier, dans l’université de VINH, on a découvert 43 étudiants dépendants vendant et transportant de la drogue. Les districts qui ont le plus de toxicomanes sont : TUONG DUONG, 23 enseignants ; KY SON, 14 enseignants ; QUE PHONG, 10 enseignants. La province de VINH et les districts de YEN BAI, DIEN CHAU, ANH SON, TUONG DUONG, QUE PHONG, NGHIA DAN sont des districts et villes où le pourcentage en rapport avec la drogue est le plus élevé.

b) Des patients infectés par le virus HIV/AIDS (SIDA)

Entre la frontière qui sépare la prostitution et les toxicomanies et celle du SIDA, il n’y qu'un pas. De nouvelles statistiques rendues publiques à l'occasion d'une réunion sur le sida organisée à Hô Chi Minh-Ville par l'Union des jeunesses communistes, le lundi 23 septembre 1996, ont provoqué une certaine émotion parmi les auditeurs. En effet, un responsable du Programme de développement des Nations Unies y a affirmé que « plus de la moitié des cas de séropositivité, enregistrés sur le territoire du Vietnam concernaient des jeunes entre 15 - 24 ans ».[6]. En certaines régions, le « nombre des jeunes filles séropositives est le double de celui des hommes ».[7]. « 85% des personnes infectées par le virus HIV/AIDS sont à l’âge de 20 à 49 ans », c’est un chiffre publié par le Service de Prévention de HIV/AIDS le 18 septembre 2006 dans une réunion avec les représentants des journalistes pour divulguer la loi de prévention et de lutte contre la maladie du siècle (photo, p. 436).

Depuis le décèlement du premier cas atteint du virus HIV au Vietnam en 1990 jusqu’au 30 juin 2006, on a dépisté 109 989 personnes infectées dont 80% sont des hommes et dont 19 261 à la dernière étape et 10 785 décédées à cause de cette maladie. Les patients infectés du virus HIV/AIDS sont répartis dans les villes et provinces du Vietnam (100%). La province de Quang Ninh (au centre du Vietnam) est celle qui bat le record : 600/100 000 habitants.[8] . Au seul mois de juin 2006 en particulier, selon le rapport, le nombre de patients a atteint 1 200 personnes. Cependant, dans la réalité, ce chiffre est beaucoup élevé. [9]

c) un tonne de drogue

Une nouvelle qui attire l’attention de ceux qui se soucie de l’éducation, est publiée dans le Jounal Tiên Phong le 20 mai 2005 : Chaque année, plus d’un tonne de drogue est importé clandestinement au Vietnam. Récemment, le Ministère de la Police a décelé un transport de 3 500 paquets de drogue, et une quantité encore plus grande depuis. Le colonel VU HUNG VUONG, le chef de Service de prévention et de lutte contre la criminalité de la drogue participe à une conférence de presse comme suit.

Extrait d’une partie de cette conférence :

Q- Votre évaluation à propos de ce décèlement ?

R- c’est un cas particulièrement considérable réalisé sur une longue durée avec un réseau d’achat et de vente ayant pour origine le Laos, passant par la frontière au Nord-Est du Vietnam, c’est pourquoi il était extrêmement difficile de le poursuivre et de le balayer. Nous l’avons développé en 2 étapes. Nous avons arrêté 21 sujets et le résultat a permis de déceler 3 500 paquets d’opium. Jamais nous n’avions découvert une telle quantité.

Q- Pourquoi, alors que le mouvement de prévention et de lutte contre la drogue est poussé de jour en jour plus fortement, la quantité du dernier décèlement est toujours plus grande que celle d’auparavant?

R- Ce n’est pas tout à fait exact. Il faut savoir que les réserves potentielles de drogue au Vietnam sont considérables et complexes depuis longtemps, mais le décèlement est encore limité. Grâce aux directives de jour en jour décisives et à l’investissement dans cette prévention plus grande de la part du gouvernement, les forces policières ont été augmentées et bien organisées ; nous avons pu déceler ainsi plusieurs causes. Faisons un petit calcul: Aujourd’hui, on a identifié environ 172 000 dépendants de la drogue. Chaque jour, un seul dépense seulement 50 000 dongs (environ 4 USD) pour se calmer. Tout ce nombre des toxicomanes “brûlent” chaque année environ de 2.500 à 3.000 milliards de dongs, soit de 209 à 266 millions de dollars par an. Pour procurer cette quantité aux dépendants, il faut, je pense, une tonne et plus.

Q- Selon certaines informations, le Vietnam a produit la drogue combinée?

R- Récemment, la police a décelé à Ho Chi Minh-Ville un cas de drogue combinée préparée sur place. Les criminels ont acheté de la drogue combinée en poudre et ont fabriqué des comprimés en la mélangeant avec le médicament du rhume et Seduxen. Plus dangereusement, ils ont mélangé même de l’héroïne et l’ont baptisé de noms attirants tels que « la reine », « Mercedes ».... À mon arrivée, les polices de Ho Chi Minh-Ville m’ont présenté 60 à 70 modèles. Nous avons pris, en collaboration avec le Ministère médical et le Ministère industriel, la décision de prévention pour contrôler strictement la production de la drogue combinée au Vietnam. C’est extrêmement dangereux de laisser passer ce phénomène.

Q- Vous êtes entré dans les salles de danse, de karaoké ?

R- Déjà depuis longtemps. En 2002, j’ai eu avis de l’utilisation de la drogue combinée dans les salles de danse et de karaoké. Dernièrement, je suis entré directement dans un point de karaoké, il me faut chercher ainsi pour comprendre le chemin par lequel s’infiltrent les comprimés de l’ecstasy dans ce milieu. L’expérience me révèle que tous les points de karaoké procurant de la drogue combinée aux clients possèdent un système de hauts parleurs puissants.

Il y a 3 semaines par exemple, je suis entré dans un point de karaoké vers 22 h 30. Je suis informé qu’y existe l’utilisation de la drogue mais je n’ai pas pu y pénétrer parce que 5 couples des jeunes ont loué une chambre, fermé à clef à l’intérieur et invité les servants à sortir. En réalité, lutter contre l’utilisation de la drogue dans ces points est très difficile.

La drogue combinée coûte très cher. La plupart des utilisateurs appartiennent à la catégorie des jeunes de familles riches, des enfants de cadres, des officiers du gouvernement. Étant riches, un grand nombre de cadres négligent l’éducation de leurs enfants, leur donnent facilement une grande somme d’argent. Pour se montrer à la mode, ceux-ci s’habillent avec coquetterie, s’amusent dans les salles de danse et de karaoké et utilisent enfin la drogue combinée.

F- Des enfants de la rue

Le phénomène des enfants de la rue n'est pas nouveau. En Europe, il semble que des jeunes « aient vécu dans les rues déjà au Moyen âge » [10]. Il y avait certainement des enfants de la rue à l'époque de la révolution industrielle. On les retrouve aussi dans les œuvres de nombreux écrivains européens et nord américains tels qu'Andersen, Twain, Dickens ou encore Gorki.

En réalité, j’ai étudié profondément ce problème des enfants des rues dans mon mémoire de maîtrise en 1997 abordant le pourquoi des enfants dans la rue, le comment ils vivent et comment les aider. Ce phénomène persiste jusqu’à ce jour.

Le quartier TÂN HUNG par exemple, est situé dans le 7e arrondissement de Ho Chi Minh-Ville, juxtaposé au quartier TÂN KIENG que j’ai présenté plus haut. Ces familles venues des provinces de tout le pays trouvent une maison ou plutôt une chambre à louer d’environ 16m2, où s’entasse une dizaine de personnes. Ils pensent trouver facilement de quoi vivre. Mais la réalité ne répond pas à leur imagination. Sans métier spécialisé, sans ressources financières, toute la famille doit travailler dur pour gagner sa vie. Chacun n’a de cesse que de s’adapter un petit métier pour gagner un peu d'argent. Ceux-ci vendent des chewing-gums, ceux-là des journaux, des fruits, des cigarettes à l'unité, des billets de loteries... Ou encore ailleurs, ils proposent leurs services comme livreurs, laveurs de pare-brise, cireurs de souliers, gardiens de voitures, de motos... On trouve les enfants qui exercent ces métiers surtout au centre de la ville, autour du marché, à la gare. C’est normal que leurs enfants n’aillent pas à l’école en errant partout dans la ville pour exercer ces métiers faciles... comme leurs parents pour arrondir le budget familial. Même la soif d’aller à l’école ne pourrait pas être satisfaite car leur condition économique ne le leur permet pas (photo, p. 439).

Dans les zones touristiques, quelques mots d'anglais permettent aux plus malins de s'improviser guides ou en tendant la main en disant "money".

Dans les marchés où l'on livre les marchandises en gros, de nombreux enfants attendent l'arrivée des voitures transportant des produits venus des provinces afin de ramasser des légumes à demi gâtés et ainsi jetés par les propriétaires, ce qui peut améliorer leurs repas ou même trouver un peu d'argent en revendant ces produits récupérés.

Au moment où ils n'ont plus rien à faire, ils s'amusent dans les parcs ou jouent aux cartes, aux billards avec l'argent qu'ils ont trouvé. Sans oublier ceux qui n'exercent aucun métier et qui errent dans la rue toute la journée. Ce qui est étrange aux yeux des étrangers, c'est de voir qu'il y a beaucoup de gens, hommes et enfants qui se tiennent devant les restaurants en suivant attentivement de leurs yeux les clients en train de manger. Ceux-ci ont à peine terminé un plat, qu’ils viennent vite vider le reste de peur que les serveurs jettent tout dans les poubelles.

À la nuit tombante, sans logement, sans ressources, des familles entières s'improvisent une vie nouvelle sur le trottoir. Certains marchés, des sous-ponts, des parcs deviennent alors les "hôtels de mille étoiles" pour ceux qui ne réussissent pas à trouver un logis pour passer la nuit. Certaines petites filles deviendraient ces victimes sexuelles infantiles décrites par CHRISTINA NOBLE dans son aventure[11] et aussi dans d’autres journaux.

« Ce sont surtout des Asiatiques venus de Chine, de Taiwan et de Hongkong principalement. Après 22 heures, les rues s'éveillent à d'autres activités. Ici, ce sont quarante-cinq mineures qui se prostituent dans un bar à bière. Là, un salon de massage où s'exercent le même commerce, comme au coin des rues où la caméra cachée entre en action. "Difficile d'acheter une jeune vierge chinoise ?", demande le cameraman. Une fille de seize ans l'emmène chez elle où de très jeunes filles adolescentes attendent pour cent vingt dollars la passe... »[12]

« ...La ville de Saigon draine à elle seule près de 40% de visiteurs de plus, qui viennent pour chercher autre chose que le paysage... Malgré les interdictions officielles, on y trouve 150 000 prostituées, dont de très jeunes filles qui vendent leur virginité comme porte-bonheur pour une poignée de dollars... »[13]

Des campagnes d'information se multiplient et les autorités tentent de réprimer une prostitution qui, dans les villes, affecte « des générations de plus en plus jeunes (8% des prostituées seraient âgées, selon une enquête officielle, de moins de quatorze ans...) ».[14]

L’année dernière (2005), j’ai pris un café dans une cafétéria au « quartier français » avec un jeune français qui est venu au Vietnam plusieurs fois. Pendant notre conversation, un petit enfant des rues est venu nous inviter à acheter des billets de loterie. Après le départ de celui-ci à notre réponse négative, ce jeune monsieur m’a fait cette observation : « j’ai remarqué ce “progrès surprenant”. L’année dernière, il y avait aussi des enfants qui sont venus me proposer d’acheter “sainement” plusieurs choses. Cette année, ils m’ont invité ouvertement à acheter des “matières blanches” en même temps ». Pour les enfants de la rue, ce serait un moyen de trouver de l'argent le plus vite et pour les clients, moins dangereux et peut-être moins cher. De même pour la prostitution infantile.

G- Cambodge, notre voisin

Pourquoi le Cambodge ?

Je n’ai jamais eu l’idée d’aller au Cambodge même comme touriste avant ce jour-là.

Vers le mois de mai 2004, lors de la réunion à Rome avec les Frères Visiteurs du monde entier, l’idée de revenir au Cambodge a surgi légèrement pendant le repas le jour d’un pique-nique. Y étaient présents à la même table le Frère Supérieur Général, les 2 Frères Visiteurs Provincial et Auxiliaire du district de Québec et moi-même. La conversation tournait autour de la mission lasallienne dans le monde entier, en particulier dans les pays asiatiques. Pour participer à la discussion, je parlais un peu de la mission des Frères au Cambodge abandonnée en cours de route, de l’arrivée des premiers Frères français en 1906, de la collaboration cohérente et active entre la France et le Vietnam pour cette installation il y a presque cent ans, de la possibilité d’y revenir en souvenir du centenaire de la présence lasallienne dans ce pays où domine le bouddhisme. Et je proposais aux Frères canadiens d’assumer cette mission pour le motif que j’avais entendu parler vaguement de la présence de quelques prêtres ou évêques canadiens dans ce pays khmer. Des propositions, des  discussions se levaient. Une solution finale acceptée par tous, sauf moi, pointait sur le Vietnam qui, selon eux, était le plus apte pour réaliser ce projet. À l’unanimité, ils me demandèrent de vider mon verre en signe d’une réponse positive à cette proposition. Après un quart d’heure de réflexion, j’ai enfin vidé mon verre en signe d’acquiescement.

Voilà pourquoi j’ai assumé la responsabilité de l’étude du problème du retour au Cambodge

1) Approche du terrain

Pendant six mois après ce verre d’acquiescement, la démarche pour la réinstallation au Cambodge se figeait dans mes inquiétudes. Des problèmes que je ne pouvais pas résoudre surgissaient malgré moi : qui allait le financer ? Où trouver des Frères compétents pour ce grand projet ? J’ai partagé cette mission confiée à quelques amis Frères aux États-Unis. Vers le mois de novembre 2004, un e-mail venu des États-Unis m’a demandé si j’avais encore le désir d’aller au Cambodge pour une approche du terrain. Après quelques jours de réflexion et d’arrangement, je lui ai donné le feu vert. Et me voilà à Phnom Penh pour la première fois le 26 décembre 2004 (photo, p.440, 441).

2) Une bonne guide

Frère Fortunat a pris rendez-vous avec Sœur Lina, cambodgienne d’origine vietnamienne, de la Congrégation de la Providence (photo, p. 442) , comme guide pendant mon séjour au Cambodge. Elle est venue me voir à l’hôtel le soir du 26 pour dresser un plan de visite du lendemain. Tôt dans la matinée, elle est déjà à l’hôtel avec une voiture de 15 places. Trois buts du “tour” sont approuvés par tous : visite de quelques villages (ou plutôt hameaux) vietnamiens, visite des maisons où les Pères de Maryknoll logent les patients du SIDA et les enfants infectés par le virus HIV et enfin visite des écoles ou centres de formation professionnelle des Sœurs salésiennes.

3) Visite des hameaux des vietnamiens

Âgé plus de soixante-dix ans, Sœur Lina a une santé apparemment bonne. Je dis « apparemment bonne » parce qu’au moment où j’écris ces lignes, elle est revenue à sa maison provinciale au Vietnam pour une convalescence de 6 mois. Elle seule est responsable de plus d’une vingtaine de « hameaux vietnamiens » en aidant la direction de ce hameau dans le domaine de l’éducation et un peu dans celui de la santé et en collaboration avec les prêtres pour l’animation des messes, des jours de fête... (photo, p. 443).

Elle nous a amenés à un hameau d’une trentaine de familles en coordonnant la visite d’une femme atteinte du SIDA qui pourtant, selon les villageois, est partie à l’hôpital et peut-être déjà décédée. Habituellement, les vietnamiens se regroupent en formant un petit hameau de 30 à 100 familles, parfois jusqu’à 300 et plus le long des fleuves.

i) vie économique

Au Cambodge, on distingue deux classes sociales celle des cambodgiens d’origine vietnamienne qui ont réussi à s’intégrer dans la communauté cambodgienne, trouvé un travail et parlé couramment cambodgien et celle des vietnamiens qui vivent en marge en formant des communautés vietnamiennes à part. La première réussit plus ou moins dans la vie, la deuxième mène une vie qu’on ne peut qualifier de miséreuse parce qu’ils peuvent toujours trouver très facilement quelque chose à manger et cela suffit pour une seule journée comme leurs prédécesseurs. Il y a des familles qui y habitent depuis 3 ou quatre générations, mais cette situation reste toujours pareille. On ne se soucie pas de faire autrement pour s’élever dans la société. Dans certains hameaux, on ne trouve aucune maison en briques, rien que des taudis misérables sans portes et fenêtres... Certains habitants vont travailler à l’extérieur, des travaux sans aucune spécialité : aide-maçon, récupérateur d’ordures, recharge des briquets à gaz... Un détail à savoir pour comprendre la mentalité de ces gens : des récupérateurs des ferrailles, des sacs de plastique par exemple, quand ils estiment la quantité suffisante pour la dépense de la journée, ils rentrent chez eux sans se donner la peine de gagner un peu plus pour prévoir le jour où quelques empêchements de travail surviendraient. Que font les femmes à la maison ? Elles se réjouissent en jouant aux cartes du matin au soir ! Sans aucune prévoyance pour un avenir où l’on ne possède plus de possibilités de travailler ou sans aucune initiative pour créer un emploi rentable, d’où une vie vraiment instable.

ii) vie humaine

C’est ici un problème très urgent. Les parents ne se soucient que de leurs besoins matériels et laissent leurs enfants vivre comme ils veulent selon leur nature. En voyant un enfant qui lance des grossièretés à ses camarades en présence de ses parents en train de jouer aux cartes sans aucune réaction de leur part, je leur demande « Vous ne les éduquez pas ? ». Ils me répondent insoucieusement : « Je ne sais pas comment les éduquer ! ». C’est l’aspiration de certains autres parents qui s’inquiètent de l’avenir de leurs enfants en rêvant d’une vie meilleure plus tard pour leurs enfants. Ils désirent trouver quelqu’un pour enseigner le vietnamien à leurs enfants pour ne pas « perdre leur source ». Mais, il me semble que ce serait une erreur, parce que sans maîtriser le cambodgien, ils ne pourront pas sortir de cet état d’isolement, s’intégrer dans la vie cambodgienne et trouver une place élevée. Leurs enfants seront comme eux, vivront à part de la société cambodgienne dans ce hameau retiré sans aucune nationalité authentique.

iii) santé

Au Vietnam, plus on vit loin de la ville, plus la notion d’hygiène fait défaut, et les cambodgiens pareillement. On prend de l’eau boueuse dans la rivière, la décante à l’aide d’un morceau d’alun et on la boit. Un prêtre vietnamien raconte : « Quand ils mangent quelque aliment dépassé qui les fait tomber malade tout de suite, à ce moment-là seulement ils croient que cet aliment dépassé est nuisible ! »

iv) racisme

Il existe une haine héréditaire entre le peuple cambodgien et vietnamien. On raconte que dans les leçons de lecture les enseignants rappellent toujours cet acte “sauvage” de nos ancêtres vietnamiens au temps de guerre : « les soldats vietnamiens ont coupé trois têtes des cambodgiens en les mettant en forme d’un trépied, mis la marmite là-dessus et font cuire du riz ». À vrai dire, de par nature, les cambodgiens sont honnêtes et pacifiques. Par contre, les vietnamiens étant malins trompent souvent les cambodgiens dans le commerce, sur la qualité des marchandises par exemple jusqu’au point où dans la rue, toute “mauvaise qualité” est attribuée à la production au Vietnam. Aussi, pour éviter des conséquences peu souhaitables, les vietnamiens qui vivent au milieu du quartier des cambodgiens, ne s’expriment pas en leur langue maternelle, même entre eux. En général, les vietnamiens ne sont pas beaucoup appréciés comme les européens par les cambodgiens. Pourtant, selon ce qu’on me dit plus de 40% de la population à Phnom Penh est d’origine vietnamienne (photo, p. 443).

v) vie religieuse

Le bouddhisme est considérée comme la religion nationale. La plupart des catholiques sont vietnamiens. Les villages que j’ai visités ont un pourcentage de catholiques très élevé. Tous ou presque tous sont catholiques. Mais il manque énormément de personnes pour les aider dans ce domaine. Un prêtre à tour de rôle vient une, deux ou trois fois par semaine pour dire la messe ou leur donner d’autres sacrements. Les fidèles manifestent une soif ardente de recevoir un Frère ou une Sœur pour les aider à vivre profondément et efficacement la religion. Une femme appartenant au comité de direction du hameau me donne ses confidences : « Ils (les fidèles) ne nous obéissent pas parce qu’ils ne voient pas en nous quelque chose qui les dépasse. À l’occasion des grandes fêtes, nous organisons aussi ceci cela, solennellement, mais nous ne connaissons rien du tout sur le catéchisme. Comment l’enseigner à nos enfants ? Que deviendront-ils à l’âge adulte ? ».

vi) vie sociale

La distance de Saigon à Phnom Penh (environ 240 km) est moins éloignée que celle de Saigon à Ban mê Thuot (environ 350 km). Jusqu’à présent, il faut un visa pour entrer au Cambodge par le port routier Môc Bài. Mais une fois passée la frontière, on sent un soulagement complet : pas de contrôle de présence et d’absence pendant la nuit ; on habite ou on circule où l’on veut. Pas besoin de demander l’autorisation pour organiser une réunion, dire une messe….

J’ai visité une propriété des Sœurs Salésiennes et celle des Sœurs de Mère Thérèse de Calcutta. Les Salésiennes ont ouvert une école maternelle, primaire et un centre de formation professionnelle pour 60 filles. Les Sœurs de Mère Thérèse s’occupent d’une quarantaine de petits enfants infectés du virus HIV. Je n’entends aucune plainte des difficultés venues du gouvernement. Par contre, les autorités aident en plus les Sœurs pour faciliter leur mission. Par exemple, les Sœurs de Mère Thérèse reçoivent facilement des médicaments venus de l’extérieur tandis qu’au Vietnam, que de formalités complexes, en plus des taxes !

J’ai visité aussi des centres où logent les patients du Sida à la dernière étape. En réalité, ce ne sont que des maisons louées (10 environ) par un prêtre américain de la Congrégation Marynold des États-Unis. Ce qui m’a fait réfléchir le plus, c’est que ces patients vivent leurs derniers jours à côté de leurs voisins qui ne les rejettent pas et ne sentent pas l’horreur de cette maladie du siècle. Pourquoi cela ? Par ignorance du danger de cette maladie ou par une compréhension totale des possibilités de la contagion ? La visite du centre où logent les petits enfants contaminés m’a beaucoup frappée. Ils sont vraiment nombreux, ces innocents !

H- Ce qu’on a fait

a) Écoles privées

En 1975, toutes les écoles privées ont été nationalisées. L'enseignement public est donc gratuit. Cependant la gratuité n'a été sauvegardée que durant quelques années. L'État, dans l'impossibilité d'assurer à lui tout seul le bon fonctionnement de l'ensemble du système scolaire, a, peu à peu, rétabli sous diverses formes la contribution financière des parents.

En principe, l'enseignement primaire est gratuit. Cela a été réaffirmé par la loi de restauration de l'enseignement primaire voté par l'Assemblée nationale au mois d'août 1991 après le 7ème Congrès. Il est seulement demandé aux familles de payer une certaine somme pour les frais généraux. Aucun frais de scolarité ne devrait être exigé dans l'enseignement primaire. Mais, en fait, aucun parent ne peut se dispenser d'apporter une contribution financière à l'école ou encore à la caisse de soutien de l'éducation. Cette participation augmente en fonction des heures d'enseignement ajoutées au programme normal, ou en fonction des travaux destinés à améliorer les bâtiments de l'école. Il est vrai que toutes ces demandes de cotisations ne sont pas directement présentées par l'école. Chacune d'elles est approuvée par l'association des parents d'élèves et l'école se contente de recevoir ces diverses sommes d'argent.

Depuis 1989, l'enseignement privé a fait son apparition au Vietnam, sous le nom de "Truong Dân Lâp" (Écoles fondées par le peuple). Pour l'année scolaire 1991-1992, on signalait, à Hô chi Minh-Ville, l'ouverture de deux nouvelles écoles "fondées par le peuple" et le passage au secteur semi-public de huit écoles publiques.

Pour l’année scolaire 1996-1997, un autre phénomène est survenu: l'inauguration de treize écoles "fondées par le peuple" à la rentrée de cette année dans la seule ville de Hô chi Minh. D'après le Ministère de l'Éducation et de la Formation professionnelle, trois autres projets sont encore à attendre de complément de dossiers. « Cette année, rigole un de mes amis, on voit l’école fondée par le peuple partout … dans la rue ». C’est vrai que l’école est présente presque partout dans tous les arrondissements de Saigon et sa banlieue. On voit partout des banderoles, des dépliants dans les supermarchés, des publicités dans les journaux….

De 1991 à 1997, 40 écoles fondées par le peuple ont vu le jour grâce aux grandes options de la réforme “consécutive” de l’enseignement. Le mot utilisé aujourd’hui est “socialisation” et dans tous les domaines : socialisation de médecine, socialisation du théâtre, socialisation du sport, socialisation… et évidemment l’éducation est aussi socialisée.

Depuis cette année-là, le nombre des écoles de cette catégorie augmente d’année en année. Sans compter les organisations sociales, de nombreuses entreprises tentent d'investir dans ce domaine nouveau. Les classes sont équipées selon les critères internationaux : tables individuelles, salle d'informatique, salles de classe climatisées avec des moyens d'étude modernes. C'est donc une orientation en vue de dépanner le Ministère de l'Éducation devant les difficultés qu’il doit affronter actuellement dans le domaine d’infrastructures d'accueil, répondant ainsi au besoin d’une grande quantité des jeunes venus des provinces pour continuer leurs études sans compter la catégorie des enfants de la rue. D’un certain point de vue, c’est une issue pour résoudre le problème du manque d’école, de classes mais les élèves doivent se charger de frais de scolarité élevés. Toute décoration possède son envers qui exige de la réflexion de la part des responsables.

La qualité de l'enseignement s’améliore évidemment. Plusieurs écoles, inaugurées quelques années auparavant, ont atteint un pourcentage de 100% à l'examen de baccalauréat. Il est facile de le comprendre, car le recrutement des professeurs compétents ne connaît aucune formalité bureaucratique. D'autre part, le traitement le plus bas des enseignants est de 30.000 à 50.000 dongs (environ 3 USD) par heure, tandis que le salaire mensuel d'un enseignant dans une école publique n'atteint même pas les frais d'études mensuels d'un écolier des établissements privés. Un salaire suffisant serait donc digne de recevoir en retour le dévouement de l'enseignant.

Dans ces dernières années, le phénomène des écoles internationales s’est accru dans les grandes villes et à tous les niveaux : primaire, secondaire et universitaire ; écoles de langue, école technique….

De même sans compter des classes maternelles publiques, presque toutes les congrégations religieuses des Sœurs ont pu obtenir l’autorisation de s’insérer dans le monde de l’éducation… mais seulement jusqu’à la maternelle ! Les Sœurs ont gagné facilement la confiance des gens, c’est pourquoi, le nombre de ces petits enfants est très élevé. Comme chez les Sœurs des amantes de la Croix à Go Vâp par exemple « il faut refuser, exprime la Supérieure, plusieurs demandes ». Pourtant, elle a reçu déjà 700 enfants. Pour celles des Filles de la Charité, il faut faire la réservation au moins une année à l’avance !

Voici quelques écoles fondées par le peuple à Ho Chi Minh-Ville.

i- École du secondaire fondée par le peuple HONG HA

- adresse : 02 Truong Quoc Dung, District de Phu Nhuam, Ho Chi Minh-ville.

- Téléphone : 99 755 67

- Directeur : Professeur HO ANH TUAN, enseignant de l’Université des Sciences et de Technologie d’ALGER (USTHP), Université de PARIS 6 et de l’Université polytechnique de Ha Noi.

L’école équipe des moyens d’enseignement modernes : vidéo – over head – projecteur en vue de réaliser peu à peu le style nouveau d’enseignement et d’apprentissage pour faire valoir l’esprit créatif du maître et de l’élève.

Toutes les salles d’études sont climatisées. Chaque élève est assuré de bons soins dans les domaines d’activités et d’études avec les meilleures conditions

La bonne qualité de l’école HONG HA donne un résultat très élevé à l’examen du baccalauréat et gagne la confiance des parents d’élèves.

ii) Ecole du secondaire fondée par le peuple DUY TAN

- Adresse : 149/2 rue Tran Huy Lieu, District de Phu Nhuan, Ho Chi Minh-Ville.

- Téléphone : 8 452 382 – Fax : 8 242 694

Enseignants compétents : Le corps professoral est composé de bons enseignants de Ho Chi Minh-Ville.

Effectif minime : Chaque classe comprend 20 élèves au maximum pour faciliter le suivi des enseignants.

Salles d’études selon les critères internationaux : salles climatisées et tables de haute qualité.

Enseignement d’Informatique et de langue : associé avec le Centre de langue MELBOURNE.

Discipline sérieuse : administration des élèves confiée à des enseignants expérimentés, contact régulier avec les parents. Une partie du corps professoral est constitué d’anciens professeurs de l’école de TABERD.

Locaux vastes et confortables : assure la tranquillité et l’environnement conforme à la pédagogie.

Pour les parents qui désirent un investissement adéquat pour leurs enfants afin qu’ils aient de bons résultats et qu’ils puissent éviter des fléaux sociaux : l’école DUY TAN répond à vos souhaits.

b) des centres d’accueil

Chaque année, le secrétariat du développement social de la Cathédrale de Saigon publie une brochure d’adresses des centres d’activités sociales des catholiques à Saigon et dans sa banlieue et aux environs. Il y en a déjà 64[15]. Parallèlement, des centres d’accueil, des orphelinats, des hospices de vieillards organisés par les bouddhistes ou par des autres organisations sont aussi signalés sans compter les centres humanitaires gouvernementaux.

i) Centre de MAI HOÀ (photo, p. 444)

Mai Hoà est un lieu d'accueil qui s'efforce de répondre aux besoins des personnes atteintes du SIDA en phase terminale.

Ces personnes, rejetées par leur famille, vivent dans une extrême misère et leur maladie déclenche la peur repoussante d'une contamination dans leur entourage.

En leur apportant des soins nécessaires, les Filles de la Charité de St. Vincent de Paul souhaitent leur rendre la pleine dignité humaine pendant le temps qu'il leur reste à vivre.

Mai Hoà est fondé et géré par les Filles de la Charité avec la collaboration de nombreuses organisations bénévoles, de médecins et de spécialistes dans divers domaines...

Le Centre Mai Hoà, constitué d'un espace de 10.000 m², peut être considéré comme le premier Centre Catholique, unique en son genre au Vietnam. Il a été établi le 17 janvier 2001 par la décision No 433/QD-UB du Comité Populaire de Ho chi Minh-Ville ainsi que par des accords gouvernementaux et diocésains.

I. OBJECTIFS :

1. Prendre soin et entourer les patients du SIDA en phase terminale.

2. Aider ces patients à se réconcilier avec eux-mêmes, avec leur famille, avec la société afin qu'ils soient en paix durant la dernière étape de leur vie.

3. Les aider à se sentir utiles en leur donnant l'opportunité de partager leurs expériences et l'occasion de participer aux campagnes de prévention.

II. CONDITIONS D'ADMISSION

1. Il n'y a pas d'admission directe possible mais sont accueillies au Centre des personnes recommandées par les établissements suivants :

- Centre des Maladies Tropicales, service E

- Centre des personnes atteintes de la Tuberculose Pham Ngoc Thach,

- L'Hôpital gratuit An Bình.

2. Ce Centre accueille des personnes atteintes du SIDA au stade terminal :

- qui ne sont pas alcooliques,

- qui s'engagent à ne pas s'adonner à l'héroïne ou toutes autres drogues et de ne pas en faire commerce.

3. Avant l'admission, une étude médicale et sociale préliminaire sera effectuée par l'assistant social du Centre.

CENTRE MAI HOA

Un foyer pour les patients du SIDA au stade terminal

Tel: (84 8) 8 926 135

E-mail : aidsmaihoa@hcmc.netnam.vn

Adresse : Lô 6 - An Nhon Tây - Cu Chi - Hô chí MinhVille - Vietnam

ii) Foyer THANH TAM

- Adresse : 17 et 14 Ben Cat, Quartier 7, District de Tan Binh, Ho Chi Minh-Ville

- Téléphone : 8 63 7373

- Représentante : Sœur Nguyen Thi Hao, congrégation de Notre-Dame de la Mission.

Objectifs : Aider les jeunes filles qui ont besoin d’un logement en sécurité dans un court délai avant l’accouchement en leur aidant à obtenir un métier qui leur convient pour se réinsérer dans la société.

Sujets : Des filles qui sont dans des situations spécialement difficiles.

Conditions d’accueil : - au- dessus de 18 ans – de tout le pays – 4 photos – sans limiter le nombre et le moment d’accueil.

Différentes activités :

-        éducation : toutes les filles qui ont besoin d’études peuvent y satisfaire, même de l’étude des langues.

-        Orientation professionnelle : couture, coupe des cheveux.

-        Aptitudes : musique, sports (tennis, nage,...)

-        Activité sociales : sorties 2 fois par an.

Voilà un panorama assez vaste de la vie des gens de « condition de vie moyenne » mais nombreux sont au-dessous de la moyenne ! Un champ de travail immense offert aux Frères. Reste le problème pour eux d’avoir des « yeux ouverts » pour percevoir cette réalité, des « cœurs brûlants » pour compatir aux cris des pauvres et enfin la force pour agir avec créativité. Il est vrai que l’étude de ces « issues possibles » évoque certains défis pour les Frères lasalliens aujourd’hui :

* défi psychologique : c’est le défi de conversion de prendre un risque lorsque, depuis longtemps, les Frères ont vécu dans une maison couverte de sécurité. Quand on se tient debout à côté des jeunes en difficulté, nous devons oser risquer, accepter une certaine désinstallation: notre vie, notre prestige, notre fortune et notre maison. Avant d’entreprendre une œuvre, il faut accepter l’idée que cela puisse s’effondrer un jour malgré nous.

* défi éducatif : étant appelés comme éducateurs, nous n’avons pas d’autre issue pour vivre notre mission. Il faut donc étudier comment répondre à ces besoins très réalistes, comment on peut venir aux pauvres et aux personnes exclues hors de la société, aux enfants marginaux pour qu’ils retrouvent leur place, qu’ils puissent partager avec nous leurs expériences.

* défi communautaire : c’est un défi appartenant à l’administration de réaliser ces projets sous une forme communautaire conforme à l’esprit de l’Institut, ce qui exige un esprit créatif en acceptant une certaine dépossession, des différences d’autrui.

I- Position du gouvernement

Depuis ces dernières années, l’expression pleine d’espoir « socialisation de l’éducation » devient courante. Populairement, nous comprenons que le gouvernement ne tient plus aujourd’hui le droit exclusif dans l’éducation. En réalité, des écoles « fondées par le peuple » ou « privées » ont vu le jour l’une après l’autre ainsi que des écoles dites internationales comme on a signalé plus haut ce phénomène. Selon les « lois de l’éducation », art 91, le gouvernement encourage l’investissement dans l’éducation :

1-     le gouvernement encourage, favorise les organisations et les individus  de financer ou contribuer financièrement à l’éducation ; la contribution des organisations ou des individus à l’éducation est comptée comme leur dépense pour le fonctionnement; cette contribution ne doit pas être considérée comme revenu, ainsi elle n’est pas soumise à l’impôt selon les prescriptions du gouvernement.

2-     [...]  L’école, les autres centres de formation bénéficient du droit de l’utilisation du terrain, sans impôt selon les lois du gouvernement.

3-     Les organisations et les individus qui investissent pour la construction de l’œuvre de l’éducation et qui aident soit en argent liquide soit en nature pour le développement de l’éducation, sont considérés comme bienfaiteurs conformément reconnus.

Art. 95 :

  1. Le gouvernement encourage et favorise les écoles, les autres centres de formation du Vietnam, collaborent avec les organisations, individus à l’extérieur, avec des étrangers d’origine vietnamienne pour l’enseignement, l’apprentissage ou la recherche scientifique.

Selon les lois concernant l’éducation, la fondation d’une école privée est plus facile qu’on le pense. Pour ouvrir une école, il suffit d’avoir une propriété suffisamment grande et un fonds suffisant. Ho chi minh-ville est considérée comme une région qui a réalisé parfaitement la « socialisation de l’éducation », en attirant l’investissement de l’extérieur pour la formation. En particulier, la socialisation dans le domaine de formation professionnelle parait le côté le plus fort.  Des écoles internationales, des centres de langue ouvrent leur porte l’un après l’autre.

Lors de la visite du Cardinal de l’Archevêché de Ho chi Minh-ville, il a mentionné les deux domaines les plus sensibles et pourtant les plus « prometteurs ». Ce sont l’éducation et la médecine. Le cardinal a rêvé depuis longtemps d’ouvrir un hôpital sans pouvoir obtenir l’autorisation tandis que dans le domaine de l’éducation, aucune école primaire ou secondaire dirigée par les congrégations religieuses n’a vu le jour. Et le cardinal ajoute : « nous espérons » accompagnant d’un sourire (typiquement vietnamien) du signe d’attente avec patience sans délai. Mais un bon signe est à peine éclos par l’article publié dans les journaux ayant pour titre « supprimer le monopole des manuels scolaires » : « Supprimer le monopole de la Maison d’édition Giao Duc (Éducation) dans la publication de manuels scolaires. Telle est la requête de l’Inspection gouvernementale dressée au Premier ministre, suite aux résultats de l’inspection publiés fin mars sur cet éditeur »[16].

Dans tous les cas, la socialisation de l’éducation est à peine ouverte,  mais le gouvernement tient toujours jusqu’à présent le rôle d’acteur.

 

[1] Lê Vinh Nhut, étudiant de l’Université Ouverte de Ho Chi Minh-Ville, reportage en 2005.

[2] Voir aussi Revue TOUI TRE (La Jeunesse), 12 septembre 2004, page 16.

[3] Voir aussi, Revue TUOI TRE, 12 septembre 2004, page 17

[4] Voir aussi Revue CONG GIAO & DAN TOC (Catholicisme et Peuple), No 1201, page 16.

[5] Voir aussi: Journal Tuoi Tre (La Jeunesse), Ty le tai nghien, samedi 18 août 2007

[6] Eglises d'Asie, No 228 1er octobre 1996

[7] Eglises d'Asie, No 228 1er octobre 1996

[8] Voir le site: http://www.hanoimoi.com.vn/vn/46/102550 et http://www.vnanet/TrangChu/VN/tabid/58/itemid/163004/Default.aspx

[9] http://www.vnanet/TrangChu/VN/tabid/58/itemid/163004/Default.aspx

[10] Stefa VANISTEDAE, Les enfants de la rue, 2e édition, Paris : Bureau International Catholique de l'Enfance, 1995, p.13

[11] Christina NOBLE, Enfant, j’écris ton nom, Gilbert, Paris: FIXOT, 1995, p.270.

[12] Renée BARBIER, Les trottoirs de Saigon, Paris, Le Figaro 13/12/1995

[13]  Renée BARBIER, Les trottoirs de Saigon, Paris, Le Figaro 13/12/1995

[14] Le Viêt-Nam, dernier maillon de la chaîne/J.C.P. – Paris, Le Monde 10 août 1994.

[15] Annexes 1, page 63, ligne 1420.

[16] HOANG MAI, Journal LE COURRIER du VIETNAM, jeudi 12 avril 2007, No 4065