CHAPITRE II
PERSONNALISATION DES
JEUNES PAR
LA PROMOTION DES VALEURS
index
1) Education aø lAutonomie
a) Ethnotype vietnamien
b) Le roâle des Heùros nationaux
2. Education aø la Liberteù
a) Au niveau de la famille
b) Au niveau de leùcole
A notre avis, le Sens du Sacreù passe pour les Vietnamiens comme une valeur fondamentale. La permanence de ce sentiment est telle quaujourdhui meâme, malgreù les bouleversements et le tragique de la conjoncture actuelle, les lignes de la penseùe, de lagir, et des ideùaux vietnamiens semblent lui eâtre ordonneùes. Notre analyse dans la 2eø partie, lenqueâte que nous avons reùaliseùe sur leùchelle des valeurs le disent clairement.
Cependant, la mutation
humaine et sociale qui se reùalise douloureusement au pays va-t-elle dans les anneùes
qui viennent releùguer ce Sacreù au museùe des choses anciennes et des reâves
deùpasseùs? Les sceptiques ne manquent pas de nous montrer ce quil en devient de
nos richesses traditionnelles dans cette guerre, dans lexploitation de lhomme,
meâme dans leùclatement de lintimiteù familiale, dans la dispersion de nos
fideùliteùs antiques!
Quen est-il en reùaliteù? Certes, on assiste plus ou moins meùduseù aø
leffilochement des attitudes et certitudes tranquilles de nos anceâtres... Mais, le
Sacreù est-il pour autant disparu dans le conflit qui nous eùcrase? Nest-il pas en
train de se deùgager des structures rigides et deùpasseùes, pour surgir sous des formes
neuves et inusiteùes qui sappellent le courage deâtre, la teùnaciteù
nationale, la fureur de vivre indeùpendants?
Nest-on pas en train de se laisser fasciner par des formes de respect exteùrieur
dobeùissance inconditionneùe qui ne seraient que des facettes multiples de ce
meâme Sacreù que lon pensait aboli? Mais, cette reùsurgence qui na pas fini
de nous eùtonner nest-elle pas aussi porteuse de virtualiteùs preùcieuses tout
comme dalieùnations possibles? Ne trouve-t-on pas dans les formes de soumission et
de reùbellion actuelles ce meâme caracteøre ambigu et eùquivoque de
leùmancipation et de la deùsacralisation?
Consultons
lhistoire des peuples. Nous constatons quapreøs le long deùtour
dapparents reniements, quapreøs un soupcon allant jusquau meùpris
porteù sur tout ce qui sappartenait au Sacreù de valeurs traditionnelles, les
peuples dOccident retrouvent aujourdhui ces meâmes valeurs quils
explicitent autrement. Si bien quil nous est permis de dire que le Sacreù est
tellement existentiel quil en devient, aø travers la vie des peuples et des gens,
eùleùment ontologique, constituant. Comme tel, il perdure mais sous les ambivalences et
lambiguiteù que reveât toute valeur humaine une fois quelle prend corps.
Ainsi, quel que soit le type de socieùteù qui eùmerge au Viet Nam, quels que soient les
eùveùnements actuellement veùcus, leùducation aura toujours aø purifier le
Sacreù pour le deùgager des formes transitoires, le deùcanter de toutes ses
malversations, et lempeâcher de sengluer dans des alieùnations de tout type,
religieux ou profane.
Cest pourquoi, il nous faut maintenant voir comment, de facon pratique, la
Peùdagogie peut contribuer aø aider lhommet et la socieùteù ouø il vit aø
deùcouvrir et nourrir toujours cette valeur qui nous parait essentielle et constitutive
de tout eâtre humain.
Pour la socieùteù vietnamienne, nous dirons donc que seule une formation saine favorisant lautonomie du regard, de la deùcision et de la reùflexion, permettra de donner aux jeunes quelques chances de libeùration reùelle qui seùtablira non dans le reniement incondionneù de ce qui les fait eâtre et vivre vraiment en tant que personnes et socieùteù, mais dans la fideùliteù aø un eâtre qui est au plus profond et au plus intime deux-meâmes.
La deùcouverte et
la promotion de toutes les dimensions de lhomme est une graâce de notre temps: la
valeur, cest lhomme. Cette attention aø lhomme va jusquaø
lexaltation de toutes les pleùnitudes de la personne humaine, corps et aâme. Les
fameuses "Confeùrences de Careâme" 1968 du RP. Thomas, SJ. concreùtisent
cette preùoccupation de notre monde.
Leùducation ne doit pas rester eùtrangeøre aø cette nouvelle prise de conscience
qui ne manquera pas de marquer la mentaliteù des jeunes daujourdhui.
Dailleurs, R. Babin a attireù lattention des des eùducateurs en disant:
"Apreøs la peùriode dautisme et de repli sur soi qui succeøde aø la grande
enfance, ladolescent, ayant rompu avec la monde dhier, se tourne tout entier
vers tout ce qui est devant lui. Il devient lui-meâme en construisant son avenir, un
avenir qui na de chances quen adoptant les valeurs "bien-coteùes"
du monde. Impossibiliteù deùduquer la personnaliteù dun jeune sans
leùduquer au monde de demain. On peut aø la rigueur reùussir aø imposer aø un
enfant la vision dun monde passeù - ce qui nest pas aø faire, bien sur! - on
ne reùussira pas avec un jeune: il est bien trop sensible aø la reùaliteù du monde
preùsent et du monde en gestation" (R.Babin, "Options" p. 33)
Sil en est ainsi,
nous pouvons mesurer limportance daider aujourdhui les jeunes aø
prendre conscience de leur condition dhomme, de la faire accepter, appreùcier,
assumer afin de donner un sens aø la vie. En un mot, favoriser cette marche vers
lautonomie qui leur permettra de se retrouver eux-meâmes.
Parents et maitres seront les teùmoins vigilants de cette tranquille monteùe qui, sur
tous les plans, assure aø lindividu une pecfection de plus en plus grande. Car,
noublions pas que le petit nait fragile et inacheveù et cest peu aø peu
quil prend sa veùritable stature dhomme. Et dans les efforts de
personnification du jeune, leùducateur veillera aø ne pas fixer ce dernier plus ou
moins inconsciemment dans son besoin dassimilation au maitre, mais au contraire, il
saura susciter le deùveloppement de la liberteù, en acceptant des moments
dincoheùrence et de pagaille, voire des heures dangoisse, neùcessaires pour
que le jeune se deùtache du besoin de "limage paternelle". Il acceptera
peu aø peu de ne pas trop seùcuriser leùleøve par des appreùciations ou des
blaâmes, mais de le faire eùlaborer lui-meâme son propre jugement, sa propre
appreùciation.
Evidemment, cela ne peut se faire que par un renouvellement de lattitude peùdagogique de leùducateur: ainsi, leùducation sera centreùe plus sur "leùveil et le deùveloppement des potentialiteùs humaines chez lindividu que sur sa conformisation aux modaliteùs neùcessairement limiteùs du comportement dun groupe deùtermineù. Elle laisse entrevoir que le jeune, dans son deùveloppement, puisse innover et franchir les limites jusque laø usuelles. Et leùducation y apparaitra comme une aide que la socieùteù apporte au jeune, non pas tant quil se modeøle sur elle, mais pour quil puisse, le cas eùcheùant, deùpasser lexemple imparfait et limiteù quelle lui offre." Axer leùducation sur les potentialiteùs comportementales de ladulte plutoât que sur les comportements effectifs dun groupe deùtermineù, cest admettre que le jeune ne doit pas neùcessairement "devenir comme nous", mais quil puisse si possible, faire mieux et aller plus loin, inventer des comportements nouveaux et donner corps aø des capaciteùs nouvelles: cest ouvrir aø des deùveloppements insoupconneùs."
Elle est donc
deùpasseùe, cette forme deùducation "transmissivet et reùpeùtitive".
Au contraire, elle devra eâtre une mise en place des attitudes en vue d
"inventer sans cesse sa propre vie" - pour employer lexpression de Gaston
Berger - de sajuster perpeùtuellement, sans se perdre, aux nouvelles conditions du
monde.
Peut-eâtre consiste-t-elle aø faire acqueùrir surtout des "principes de
reùfeùrences" valables, aø eùveiller la recherche, lexpression de soi,
loriginaliteù dans la reùfeùrence aø autrui?
Ecoutons Jean XXIII: "Esprit dinitiative, climat de spontaneùiteù et de
sinceùriteù dans la vie religieuse de ladolescent, voilaø quelles sont les lignes
de conduites que la vie du colleøge trace au jeune homme pour lavenir.
Ladolescent est aø laâge ouø il doit sefforcer par lui-meâme de
deùcouvrir son eâtre et de former sa personnaliteù.
Susciter une prise de
conscience de la personnaliteù, promouvoir une eùducation aø lautonomie, aø
lesprit dinitiative, tels doivent eâtre, nous semble-t-il les premiers
objectifs et les conditions indispensables dune eùducation aux valeurs.
Tout cela est bien beau, comme le sont dailleurs la plupart des principes
deùducation nouvelle quon a baptiseùe de "non-directiviteù" ou de
"peùdagogie dinvention". Des principes, il le faut certes pour insuffler
et donner une signification aø nos efforts. Cependant reste aø savoir dans quelle mesure
ils peuvent servir de cadres de reùfeùrence pour laction des eùducateurs
vietnamiens conditionneùs par un contexte psycho-social qui exige des orientations
particulieøres:
Nous avons eùvoqueù plus haut les richesses, les ambivalences et lambiguiteù du
Sens du Sacreù comme valeur traditionnelle vietnamienne aø exploiter pour doter la
personnalisation des jeunes dun dynamisme interne qui convient aø la fois aø son
tempeùrament ethnique et aø ses aspirations profondes.
Certes, ce ne sera pas du premier coup que leùducateur vietnamien verra ses jeunes
- hier bien encadreùs par des institutions stables, soutenus par une culture
bi-milleùnaire et des traditions profondeùment enracineùes - devenir des hommes
autonomes, conscients deux-meâmes et de leur environnement social.
De tels
"miracles" ne sont plus admis par la logique de notre temps.
Nous pensons quau-delaø des meùthodes, cest aø un changement de perspective
et de mentaliteù quil faudrait peut eâtre aboutir: Ce Sens du Sacreù que nous
reùclamons comme un heureux patrimoine de nos Anceâtres, ce meâme Sens du Sacreù doit
nous inciter aø deùvelopper chez les jeunes Vietnamiens le respect de la Personne et les
grandes valeurs de vie et de culture qui font la noblesse et la grandeur de la personne
humaine.
Ce travail nous engagera nous-meâmes et peut-eâtre exigera-t-il de nous une vision moins
fragmentaire, une conception plus souple de lautoriteù et de la discipline, donc
plus conforme aø la nouvelle situation?
De cette facon, une fois le Sens du Sacreù bien purifieù de tous ses mythes et tabous, il nous apparaitra non plus comme reùaliteù ambigue mais comme dynamisme fondamental dune eùducation efficace et adapteùe: en effet, lorsquil est bien orienteù, ce Sens du Sacreù nous fournira des points dappui neùcessaires aø leùlaboration des lignes de force dune Peùdagogie de type personnel. Il est hors de doute que pour le Viet Nam, ce Sens du Sacreù est porteur de richesses quon trouve dans le tempeùrament ethnique dintroverti et le respect des Anceâtres, du passeù, douø, possibiliteù dune "Peùdagogie du Heùros".
<index>
La caracteùrologie, dans sa meùthode de travail, est une science passionnante: elle saisit lindividu dans sa totaliteù, comme un tout vivant et non dans un de ses eùleùments possessifs, dans une de ses faculteùs seùpareùes.
Etudier quelquun,
cest le comprendre, cest le comprendre du dedans. Cette compreùhension aide
aø vivre en "bonne intelligence avec lui, aø le "bien prendre", ce
qui est le tout de leùducation.
La tendance moderne en peùdagogie est lindividualisation du travail collectif. Il
sagit de provoquer ou de faciliter le deùsir dexpression ou daction de
chaque enfant, de susciter en chacun les meilleures possibiliteùs pour la construction de
sa personnaliteù en lui offrant un milieu favorable aø son eùpanouissement. Un tel
programme est insoutenable sans tenir compte des particulariteùs caracteùrologiques, car
chaque caracteøre a ses lignes de force aø exploiter, aø valoriser, et ses lignes de
reùsistance aø adoucir ou aø deùgager.
Quelle serait donc
notre "tactique eùducative" devant ce probleøme?
Il faut certes, agir aussi sur les autres facteurs qui participent aø la construction de
la personnaliteù. Mais il faut dabord utiliser les puissances latentes du
caracteøre.
On ne commande aø la nature quen lui obeùissant. Cette reøgle baconnienne se
traduit ainsi dans le langage caracteùrologique: "On neùduque un caracteøre
quen utilisant de facon rationnelle ses lignes de plus grande pente" (Le Gall)
Toutes les lignes de force dun caracteøre doivent eâtre utiliseùes au maximum et
aø loptimum. En un certain sens, chaque disposition fondamentale est aø la fois
une puissance positive et un obstacle.
A en croire aø nos enqueâtes et recherches caracteùrologiques, il en ressort que "le groupe vietnamien appartien au type introverti dont les richesses de leùleùment "eùmotiviteù" 73o/o, et leùleùment "secondariteù" 69o/o constituent des forces latentes de ce caracteøres.
Le travail de
leùducateur vietnamien consistera donc aø baâtir sa peùdagogie aø partir de ces
veùritables dynamismes pour aider ses jeunes aø se construire eux-meâmes. Ainsi, dans
leùducation de leur eùmotiviteù, il saura exploiter cette propension aø
lamitieù, ce sens de lautre (respect, dialogue) pour les sensibiliser aø la
vie du groupe que deùjaø la secondariteù a developpeù pour son propre compte, mais
peut eâtre dans un horizon trop eùtroit.
Dautre part, les aider aø surmonter leur susceptibiliteù trop grande et aø les
encouager dans leur esprit de deùcision (en leur donnant des occasions de triompher de
leur manque de confiance en eux, de cette peur de se tromper, de cette timiditeù qui les
rendrait gauches et embarrasseùs).
Ici le moyen le plus
aø la porteùe de leùducateur vietnamien serait dapprendre aø ses
eùleøves aø travailler en groupe: de ce fait, il aura viseù un double but: renforcer
leur personnaliteù - qui ne saffirme que par la confrontation et la contestation -
et leur inteùgration dans des communauteùs de vie. Nous reviendrons sur ce point.
Bref, que de valeurs aø proposer au tempeùrament eùmotif du Vietnamien: amitieù,
sinceùriteù, justice, humaniteù, respect des personnes etc...
Sans doute, depuis quelque temps, la litteùrature nationale na pas manqueù
dexploiter les richesses reùelles de cet eùleùment caracteùrologique de
lethnotype vietnamien.
Cependant au delaø de
laction individuelle de leùducateur, il sagit en outre de faire prendre
conscience au jeune de son propre caracteøre, lui apprendre aø loccasion de mille
petits eùveùnements aø mieux appreùcier ses possibiliteùs, aø deùterminer plus
exactement ses limites, et le preùparer de la sorte aø mieux assurer la direction de sa
vie.
Il faut donc transmettre aux jeunes Vietnamiens cette habitude de creùer, et non
seulement de reùpeùter des lecons apprises, lhabitude de poser des questions et
non seulement de noter silencieusement les cours, lhabitude de chercher des
documents et non seulement deùcouter sagement un professeur... En dautres
termes, leur donner le gout et lhabitude de sorienter eux-meâmes, en pleine
autonomie et dans des deùcisions personnelles.
Tout cela suppose de la part de leùducateur une certaine confiance, voire le gout
du risque, et le sacrifice dun protectionisme qui ne fera que retarder
leùvolution de la personnaliteù chez leurs jeunes.
Nous abordons
maintenant le deuxieøme eùleùment de lethnotype vietnamien: la secondariteù,
et avec elle, toutes ses qualiteùs et deùfauts que nous appelons stabiliteù,
teùnaciteù, discipline, ordre... mais aussi cramponnement deùmesureù au passeù, au
conformisme, esprit rancunier...
Ici encore, notre action eùducative doit viser aø loptimum: Faire prendre
conscience de veùritables valeurs de cette secondariteù en soulignant la
perseùveùrance dans leffort, le souci de lordre, de la meùthode - encore,
faut-il faire remarquer que lordre ne doit pas eâtre rechercheù comme but en soi,
mais comme moyen - la fideùliteù aux devoirs, la meùmoire du coeur etc...
Par contre, il serait bon
dinviter les jeunes aø faire de temps aø autre lauto-critique de leur
comportement pour essayer de voir si ce dernier nest pas influence par un
conformisme alieùnant, une susceptibiliteù volontairement nourrie, un certain
laisser-vivre qui risque de ne plus faire sentir le besoin dinitiative ou
dauto-deùtermination.
Sur le plan pratique, nous verrions volontiers leùducateur encourager ses jeunes
dans lacquisition du sens critique qui se traduit non par une deùpreùciation
systeùmatique, ou un scepticisme steùrile, mais une appreùciation saine, un jugement
personnel afin de ne pas se laisser entrainer par des pressions des propagandes, des
publiciteùs ou des snobismes divers.
Ensuite,
lautonomie personnelle ne peut se concevoir sans la connaissance de soi, douø
limportance pour leùducateur dapprendre aux jeunes de pouvoir mesurer
eux-meâmes leurs lacunes, leurs progreøs ou leur reùgressions, sans preùsomption,
comme sans deùcouragement.
Nous touchons ici un probleøme deùlicat, au niveau de lenseignement, celui de
labus des classements individuels dans les classes. Sans vouloir nier les avantages
qui entourent ce proceùdeù - eùmulation, possibiliteù de controâle par les parents -
nous nous sommes demandeù si lexploitation systeùmatique de cette meùthode ne va
pas aø lencontre du but de leùducation qui est de viser au plein
eùpanouissement du jeune. Or, quen est-il en reùaliteù?
Les classements,
leùmulation qui eùtaient au deùpart des moyens, se sont par la suite transmueùs
en fin, par limportance aø laquelle saccrochent les eùleøves preùoccupeùs
deùsormais du "passage", des examens, des prix...; autant deùleùments
qui ne manqueront pas de deùgeùneùrer en "bachotage", en fraude, et
peut-eâtre heùlas, de creùer une certaine hantise pour peu que les parents ou les
maitres insistent dans ce sens. Aussi, nest-il pas rare de voir certains eùleøves
sapeùs dans leur enthousiasme, recroquevilleùs dans leur complexe dinfeùrioriteù
pour avoir gardeù plusieurs mois de suite la dernieøre place de leur classe!
Bien triste reùaliteù qui doit faire reùfleùchir certains adultes trop engageùs
eux-meâmes dans un certain "systeøme reùmuneùrateur" ...
Si nous admettons au deùpart qu "eùduquer, cest rechercher les aptitudes personnelles du jeune pour les deùvelopper au maximum afin de lacheminer vers son autonomie la plus aurthentique et aø son insertion sociale la plus spontaneùe", alors nous aurons plus de chance de nous entendre sur des moyens:
Que proposer?
Il ne nous appartient pas dans le cadre de notre travail de remettre en question tout un
systeøme, un ensemble de structures existantes. Neùanmoins, nous reùfeùrant aø
certaines expeùrimentations encore timides aø ce niveau ici ou laø dans notre pays,
nous pouvons deùjaø soumettre aø nos colleøgues vietnamiens quelques suggestions
pratiques suivantes:
Dans les classes primaires, nous proposons un "classement" par matieøres au
lieu de le faire pour lensemble de toutes les matieøres. Et cela pour 2 raisons:
1) Cette facon de proceùder permet aux parents et maitres de constater les aptitudes
personnelles de lenfant, et du meâme coup, ses deùficiences par ailleurs, afin de
laider plus efficacement.
2) Cette meùthode permet ensuite de sauvegarder ce dynamisme si naturel chez
lenfant: leùmulation.
Mais quaø partir
des classes secondaires, nous preùconisons la suppresion de tout classement afin
dentrainer les jeunes aø cette "auto-reùgulation", preùlude aø une
eùducation du jugement personnel et du sens critique. Ils auront ainsi loccasion de
suivre eux-meâmes leur "progression personnelle" par rapport aø leur propre
niveau anteùrieur. Ici, on pourrait adopter le systeøme ameùricain de notation
A,B,C,D...
En outre, il parait souhaitable deùtablir la note moyenne de la classe pour fournir
aø chaque eùleøve un terme de comparaison situant sa propre progression par rapport aø
lensemble de ses camarades. La classe prendrait ainsi mieux conscience que sa valeur
reùsulte de la valeur de chacun, et le professeur serait aø meâme dadapter sa
meùthode denseignement au niveau cosntateù.
Notons pour terminer
que ces suggestions ne sont valables que dans la mesure ouø les eùducateurs eux-meâmes
sont deùsamorceùs de lesprit de systeøme et de la meùfiance pour tout ce qui
favoriserait tant soit peu linitiative ou lautonomie des jeunes.
De plus nous sommes parfaitement conscients des difficulteùs pour la reùalisation de ces
propositions, compte tenu du contexte du pays qui charrie encore peâle-meâle les
heureuses transformations tout comme lenracinement de certaines institutions,
heùritage dun passeù en contact avec leùtranger. Cependant nest-ce
pas aø notre avis, une bonne politique de se deùlivrer de lautre que de
sefforcer aø devenir soi-meâme autrement, si lon ne veut pas eâtre autre
aø soi-meâme.
Nous pensons donc que
seule cette condition permet aø notre peuple daccueillir le monde tout en restant
fideøle aø lui-meâme, aø ses valeurs, aø sa vision propre de la vie. Pour cela, aø
coâteù de cet effort dadaptation au rythme de vie interpeleù par la socieùteù
en marche, leùducateur vietnamien ne doit pas oublier de favoriser pour ses jeunes
un "climat deùpanouissement" dans lequel ces derniers peuvent retrouver
aø tout moment des cadres de reùfeùrences du type dhomme proposeù aø son
ambition.
Nous sommes donc ameneùs aø parler de la "peùdagogie du heùros" comme moyen
de formation de la personnaliteù des jeunes vietnamiens et aø travers le
"heùros", proceùder aø une mise en place dune hieùrarchie des valeurs,
veùcues par des hommes ayant la meâme histoire, la meâme civilisation, la meâme
culture queux dans la marche peùnible vers leur personnalisation. Et les
eùducateurs ne manque-ront pas dexploiter intelligemment ce treùsor afin de
proposer aux jeunes un eùventail assez large de point de repeøre pour sorienter
vers la reùalisation de leur "devenir adulte".
Tel par exemple ce
Nguyeãn Coâng Tröù (1778-1858) qui occupe une place preùpondeùrante dans le
programme du Secondaire et dont les deux textes ont servi de cadre de reùfeùrence pour
linterpreùtation de nos enqueâtes.
On peut dire que sa vie est en harmonie avec sa penseùe et sa vison des valeurs.
Devenu mandarin aø 42 ans, ayant servi trois reøgnes successifs (Minh Maïng, Thieäu
Trò, Töï Ñöùc), plusieurs fois limogeù et reùhabiliteù pour avoir oseù dire la
veùriteù aux Rois et aux Princes, Nguyeãn Coâng Tröù vit reùellement le type
dhomme de Tröônïg Phu dont il a si bien brosseù le portrait pour les jeunes
geùneùrations. A travers son oeuvre, nous sommes surpris par un accent doptimisme,
denthousiasme irreùsistible, alors que sa vie (son destin) est loin de ly
encouager.
Si nous continuons cette "Galerie des Portraits", certains doivent retenir notre attention deùducateur, car ils repreùsentent pour nos jeunes des types dhommes ayant veùcu les meâmes valeurs nationales traditionnelles, tout en insistant chacun sur un aspect particulier. Cest aø leùducateur de rendre preùsentes et vivantes ces images du passeù.
Parlons-nous de pieùteù filiale aø nos jeunes? Sur ce sujet, les exemples ne manquent pas; quon nous permette de den citer seulement un aø titre dinformation: Ce long poøeme Luïc Vaân Tieân, projection fideøle de la vie de son auteur Nguyeãn Ñình Chieåu (1822-1888), nest-il pas un document exaltant aø la fois la pieùteù filiale et lamitieù? Lauteur eùtait un intellectuel eùclaireù et de grande valeur. Laureùat de plusieurs Concours Nationaux, il deùcida en 1848 de remporter pour une fois encore son succeøs au Thi Hoäi. Malheureusement, au cours de son voyage, pour se rendre au Centre du Concours, il recut la nouvelle de la mort de sa meøre. Le jour meâme, il rebroussa chemin, sacrifiant ainsi son ambition.
<index>
b) Le roâle des Heùros nationaux
Il nous suffit de
parcourir le programme de Litteùrature des classes du Secondaire, de Ñeä Nguõ aø
Ñeä Nhò (4e aø 1eøre) pour constater combien notre patrimoine litteùraire est riche
en eùleùments eùducatifs aux valeurs.
Pendant toute leur adolescence, les jeunes Vietnamiens sont en contact avec de nombreux
eùcrivains dont les oeuvres et surtout la vie les encouragent personnelle aø la
pieùteù filiale. Il est rentreù, pleura la mort de sa meøre, tellement quil en
devint aveugle.
Puis tout au long de son oeuvre, cest pour ainsi dire une expeùrience de la vie qui
se deùroule devant ses lecteurs, une expeùrience ameøre mais combien enthousiasmante
pour les jeunes. Dailleurs dans son poeøme, il semble sadresser aø la
jeunesse. Lintroduction nous permet de formuler cette hypotheøse:
"Trai thì Trung, Hieáu laøm ñaàu
Gaùi thì Ñöùc Haïnh laø caâu söûa mình"
(Lhomme doit mettre la pieùteù filiale et la fideùliteù patriotique au-dessus de
tout; et la femme doit prendre la Vertu comme but de son perfectionnement).
Quant au sentiment
patriotique, lexemple de Phan Thanh Giaûn (1796-1867) est trop beau pour que
leùducateur puisse ignorer ou laisser passer sans accrocher lattention des
jeunes. Preùferer sa propre mort aø celle de ses compatriotes, mourir dans la
geùneùrositeù plutoât que vivre dans la honte. Nos anciens administrateurs eùtrangers
du XIXeø sieøcle ont rendu eux-meâmes un teùmoignage eùlogieux aø notre Heùros
national.
Phan Thanh Giaûn a trouveù son digne eùmule dans la personne de LeâVaên Duyeät
quon pourrait appeler aø bon droit lincarnation de la justice, de la
rectitude du jugement qui lui ont valu tant dinfluence, mais lui ont creùe aussi
pas mal dennemis ambitieux.
Enfin, le beau sexe
na pas raison de se sentir oublieù, car les femmes daujourdhui peuvent
aussi trouver aø travers lhistoire et la litteùrature des points de repeøre dans
la promotion des valeurs.
Les deux soeurs Tröng, Trieäu AÅu, et plus preøs delles encore, cette
"femme modeøle" dans la personne de leùpouse de Phan Boäi Chaâu, ne
sont-elles pas toutes des eùchos exaltants de cette fideùliteù aux "Trois
rapports" de la morale confuceùenne? Ou bien nos filles daujourdhui
senthousiasment-elles davantage devant la conduite de la meøre de Taùn Cao pour
sauvegarder le "Ñöùc Haïnh", but de leur perfectionnement personnel?
Notre intention
nest pas de raconter ces faits pour eux-meâmes, mais damorcer leffort
de nos eùducateurs dans la deùcouverte des "richesses reùelles" de notre
patrimoine culturel du passeù.
Rappelons-nous que les valeurs partent de linteùrieur, elles ne simposent pas
du dehors; moins encore, elles ne doivent pas se deùcoller de la vie.
Il est vrai que le Culte des Anceâtres, lattachement au passeù constituent une force dans la civilisation et la culture vietnamiennes. Ils ne le sont reùellement que dans la mesure ouø nous cessons densevelir nos jeunes dans la seùcuriteù et la certitude de nos peøres, mais plutoât de les inquieùter, de les orienter vers la recherche des criteøres de choix et deùvaluation. Ainsi, notre eùducation, pour eâtre efficace, doit aboutir aø cette autonomie personnelle qui ne sacquiert quau prix de nombreuses remises en question et dexpeùriences veùcues et confronteùes.
Dans cette
"aventure eùducative", le roâle de leùducateur est primordial.
Il propose des criteøres aux jeunes, sans les choisir aø leur place. Principe
eùleùmentaire, mais combien important pour ceux qui sont trop habitueùs aø penser et
aø agir en fonction du groupe. Pour preùvenir ce danger, leùducateur vietnamien
essaiera dexiger des jeunes quils aillent jusquaux significations et
directions ultimes des choses: Leur faire prendre du recul psychologique neùcessaire pour
envisager un probleøme, ou pour "lire" un eùveùnement, leur faire
peùneùtrer dans laâme du heùros, se mettre aø sa place pour juger, eùvaluer,
choisir.
La peùdagogie du heùros est exaltante, mais comporte aussi des exigences des plus
seùveøres, comme le demande dailleurs toute eùducation seùrieuse.
<index>
Avouons tout de suite
quil est difficile de sentretenir de cette question.
Devant un pareil sujet, nous sommes treøs vite la proie des reùactions instinctives.
Nous avons du mal - nous, adultes - aø eâtre veùritablement sereins devant ce
probleøme de la Liberteù.
Un des eùleùments
essentiels de la formation des personnes sera deùveiller des liberteùs, climat
indispebsable aø leùducation au choix. Comment ne pas voir que leùveil et
la conqueâte de la liberteù sont lieùs aø lexercice du jugement, ce jugement qui
percoit les valeurs au service desquelles la liberteù puisse sengager?
Nest-ce pas une des taâches primordiales de leùducateur que dapprendre
aø discerner les vraies valeurs et que de proposer une hieùrarchie des valeurs dans un
monde ouø une information facile et envahissante met tout sur le meâme plan?
Parents et maitres, il nous faut, par notre action et notre influence, montrer aux jeunes
quil y a une hieùrarchie des valeurs; quil est des valeurs qui
meùritent quon risque pour elles, quon se mette aø leur service, et
quil en est dautres qui ne sont que des pseudo-valeurs qui asservissent. Il
nous faut montrer des liberteùs qui reùpondent aø lappel de ces vraies valeurs,
des liberteùs qui sengagent, des hommes qui risquent pour des grandes causes. Cette
action conjugueùe des parents et des eùducateurs reveât un caracteøre de premieøre
importance, pour la bonne raison que lenfant moderne, eùtant plus rapidement
plongeù dans le monde des adultes, reùclame une orientation plus suivie dans son option.
Autrefois, lunivers clos de la famille reùussissait encore aø filtrer des
eùveùnements du village ou de la citeù. De ces eùveùnements, les parents donnaient
une explication immeùdiate et qui "suffisait aø lenfant". Mais
aujourdhui lenfant na plus dunivers preùserveù, si ce nest
son propre reâve, et encore! Jeunes et adultes se partagent le meâme monde. La
teùleùvision, la presse, le spectacles de la rue font connaitre aux jeunes des
reùaliteùs sociales, culturelles, politiques...
Tout cela les oblige aø reùfleùchir, aø juger, aø eùvaluer.
De plus, le jeune, du fait de son "inteùgration preùmatureùe" au monde des
adultes, simpreøgne des valeurs nouvelles consacreùes par lentourage, en
deùcalage et souvent en conflit avec la veùriteù enseigneùe en famille ou aø
leùcole.
Autant de raisons qui nous incitent aø penser aø une Peùdagogie des Valeurs dont la
liberteù sera le climat favorable aø une eùducation authentique. Evaluer, cest
juger, cest se compromettre, cest sengager.
Cette eùducation de la liberteù, nous allons lenvisager dans deux niveaux: au
niveau de la famille et au niveau de leùcole.
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Parler de la liberteù, pour un certain nombre de parents vietnamiens, cest remettre en question la notion meâme dautoriteù en famille. Ils ont raison dy penser, car aø lheure actuelle, il sagit pour nous, adultes, de reùfleùchir aø cette finaliteù, aø cette justification de lautoriteù, pour que quand nous avons aø "exercer notre autoriteù" nous le fassions sans mauvaise conscience. Au fond, autoriteù ne soppose pas aø liberteù. Cest pourquoi, si lautoriteù est bien comprise, elle gardera toujours sa raison deâtre, et nous dirons meâme, elle aidera les jeunes dans leùveil de leur liberteù.
Que les parents vietnamiens ne saffolent donc pas. La notion de liberteù nest pas une notion importeùe de lexteùrieur. Elle vit latente, dans notre aâme orientale, elle ne demande quaø eâtre eùveilleùe, aø sorienter.
Reùcemment, le 23 mars
1968, nous avons recu une lettre dun de nos anciens eùleøves (22 ans) qui nous
eùcrit en compleùment de reùponse aø notre enqueâte sur les valeurs: "...En
geùneùral les parents vietnamiens soccupent beaucoup de leùducation de
leurs enfants. Ils font souvent deùnormes sacrifices financiers pour les envoyer
dans des bonnes eùcoles. Cette preùoccupation des parents se prouve encore par le nombre
fabuleux de parents qui participent aux Associations de Parents deùleøves et aux
Colloques Parents-Professeurs. La plupart des parents sont treøs "libeùraux"
maintenant, et il serait faux de dire quils empeâchent la personnaliteù des jeunes
de seùpanouir..."
Espeùrons que ce teùmoignage soit leùcho fideøle de cette eùvolution si
appreùciable dans la mentaliteù des parents vietnamiens daujourdhui. Ce qui
montre quils ont reùussi aø "faire le pont" entre la notion de liberteù
et dautoriteù.
Dailleurs cest un fait incontestable que la famille vietnamienne a eùteù
depuis toujours le premier milieu eùducatif qui marque la personnaliteù et la
socialisation des jeunes. Sans doute, largument dautoriteù avait la
preùseùance, mais cela ne veut pas dire que le sens de la liberteù eùtait pour autant
ignoreù ou refuseù. Cest ce qui nous permet de fonder notre espoir une fois de
plus sur le milieu familial dans leùducation des jeunes aux valeurs.
Depuis longtemps, le bon sens populaire a reconnu quun "enfant aime est un enfant heureux", cest-aø-dire un enfant deùjaø en possession de ce "meùtier de vivre" que Rousseau voulait quon apprenne aø son Emile. Nous touchons ici un facteur essentiel pour leùpanouissement du jeune en famille: la seùcuriteù affective. Il faut quil se sente accepteù, aimeù par les membres de la famille. Or la premieøre difficulteù aø laquelle se heurtent les adultes, speùcialement les parents, cest darriver aø voir veùritablement le jeune, aø le consideùrer tel quil est, avec ses valeurs propres qui ne sont pas toujours dans loptique des parents. Et le drame est que nous, parents, avons du mal aø entrer vraiment en relation avec nos enfants parce que nous les abordons treøs souvent par le biais de nos raisonnements et de nos plans, alors queux, ne sont pas du tout dans cet univers-laø.
Si nous voulons
envisager les probleømes de nos enfants et surtout ce probleøme crucial de la liberteù,
ce serait un effort dhumour vis-aø-vis de nous-meâmes, de recul pour nous dire:
"Nous ne voyons pas le monde de la meâme manieøre" et il faut eâtre laø
attentifs, respectueux, accueillants.
Le Cardinal Suenens eùcrit aø ce propos: "Nos jeunes reùclament de nous que
lon ait foi dans leurs eùnergies latentes, naturelles et surnaturelles... Les
Teddyboys, les Blousons Noirs qui ne savent que faire de leurs eùnergies inemployeùes
nous montrent par labsurde quil y a laø une carence aø combler, si nous
voulons reùpondre aux vraies aspirations"
Cette peùdagogie de la
confiance suppose donc avant tout lacceptation effective du jeune dans le cadre
familial. Combien de jeunes nont cesseù de faire remarquer leur solitude au milieu
des leurs, ouø les enfants organisent leur monde, sans la moindre attention de la part
des adultes, ou la fin de la journeùe, les parents nont autres conversations
que leurs probleømes...et le poste de radio pour combler les instants ouø ils ne savent
plus quoi dire ni quoi inventer!...
Reconnaisons quaø ce niveau, nos familles vietnamiennes auraient inteùreât aø
consolider ce lien deùjaø si fort du sang, par une ambiance de spontaneùiteù,
dattentions reùciproques en famille: En cela, les anniversaires, les feâtes, les
veilleùes, les rencontres... constituent un atou important aø exploiter pour creùer un
climat affectif favorable aø leùducation de la personnaliteù des jeunes sans que
lautoriteù ait aø intervenir trop brutalement. La feâte, cest le point
culminant de lexistence communautaire et le moment ouø saffirment les
supreâmes raisons de leâtre. Il y a laø, pour leùducation des valeurs des
criteøres aø mettre en eùvidence.
Une fois que le jeune se sent reùellement chez lui, en famille, la taâche des parents
sera plus facile. Cest aø ce moment que la famille pourra laider vraiment aø
la deùcouverte dautres valeurs, charrieùes par le monde moderne de la technique,
qui risquent de semer la confusion dans son esprit.
Il faut que la famille aide le jeune aø faire le tri, aø donner aux moindres parcelles
de son "butin quotidien" leur densiteù et leur relativiteù. Ainsi par exemple,
les jeunes lisent les journaux, eùcoutent la radio, regardent la teùleùvision. Que de
faits sont emmagasineùs sans peut-eâtre provoquer une reùaction positive chez eux.
Cest alors que les conversations pendant les repas, les veilleùes en famille vont
permettre aux adultes de faire le point sur la hieùrarchie des valeurs et leur
ambiguiteù. Il est bon de leur apprendre aø "lire" correctement les
eùveùnements: faire remarquer que les donneùes de fait sont relatives (les notes de
classe sont relatives aø des moyennes, le nombre daccidents relatif au total des
veùhicules en circulation...); leur faire deùcouvrir quaø coâteù des crimes,
des deùmissions, il existe aussi dautres sentiments plus nobles: coopeùration,
solidariteù internationale, deùvouement obscur mais combien meùritoire des meùdecins,
des missionnaires .. Les sensibiliser aux probleømes concrets de leur participation dans
le monde: campagne de la faim, opeùration "polio", lutte contre le
sous-deùveloppement etc...
En un mot, il ne suffit
plus dapporter aux jeunes une veùriteù toute faite (le monde est laø pour la
contredire), une veùriteù acheveùe, "consommable". Il faut encore penser avec
lui, tout aø la fois le monde qui seùtale devant lui, et lui se creùant devant le
monde. Douø responsabiliteù eùducative des parents.
Certes un probleøme se pose: que les parents eux-meâmes soient au courant de cette
eùvolution rapide du monde et surtout que leur inteùgration personnelle dans ce meâme
monde soit veùritablement assumeùe. Autrement dit, quils favorisent, selon leur
condition, laccueil des moyens de culture et dinformation en famille:
journaux, revues, radio, teùleùvision, spectacles, sorties...
Il est vrai que nos familles vietnamiennes pour le moment ne sont pas toutes en mesure de penser concreøtement aø ces moyens eùducatifs. Cependant sappuyer sur ce preùtexte pour eùcarter systeùmatiquement ces preùcieux auxiliaires serait meùconnaitre les vraies exigences de leùducation daujourdhui. Nous connaissons certaines familles qui, par peur de linfluence neùgative du cineùma, des spectacles, des rencontres...obligent les jeunes aø se morfondre entre les quatre murs de leur chambre les jours de congeù au lieu de profiter de ces occasions pour eùduquer leur jugement, ajuster leur personnaliteù. Ces parents pensent-ils quelquefois, quen dehors des jours de congeù, les faits et gestes de leurs enfants eùchappent aø leur controâle?
Heureusement quil
existe aussi des parents qui discutent avec leurs enfants sur un film, un article de
journal auxquels ils les auront inteùresseùs...
Admettons que ces proceùdeùs eùducatifs comportent un certain risque.
Alors nous dirons: que les parents et les eùducateurs acceptent les risques et les
acceptent reùellement. Il y a laø une difficulteù reùelle. A partir du moment ouø
lon aime pour de bon ses enfants, on a un peu peur de les laâcher.
Que de fois, il nous
arrive de dire: "Cest laffaire des adultes...Il nest pas encore mur
pour..." Mais, il ne le deviendra jamais si on ne lui laisse pas faire son
expeùrience. Avec cette psychologie de la protection nous introduisons un risque beaucoup
plus grand: celui de laisser lenfant grandir paralyseù dans son intuition, faute
davoir rencontreù quelquun pour leùveiller et la mettre en valeur.
"Cest aø lavenir que les eùducateurs doivent penser au jour ouø,
eux-meâmes neùtant plus laø, lenfant seul devant les situations nouvelles
et portant aø son tour la charge de lavenir, devra creùer, oser, deùcider...Toute
saine eùducation tend aø rendre leùducateur progressivement inutile, et
leùduqueù indeùpendant entre les justes limites" (Paul Grieùger).
Cest dans cette perspective que leùcole est la plus habiliteùe pour seconder laction des parents lorsque cette dernieøre naura pas eùteù suffisamment efficace, par manque de moyens ou de compeùtence.
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Ce dernier eùtat
de chose se constate plus freùquemment au Viet Nam ouø trop de parents sont heùlas
souvent harceleùs par leurs fonctions sociales ou leurs preùoccupations mateùrielles,
laissant eùchapper aø regret, des occasions daider efficacement leurs enfants.
Douø sexplique ce souci qui hante les parents vietnamiens dans le choix des
bonnes eùcoles pour leurs enfants.
Leùcole, communauteù eùducative de la personne.
Daucuns savent
quune neùcessiteù simpose aujourdhui plus que jamais: relier
lenseignement aø la vie. Or, comment se preùsente la vie actuelle? Nous vivons, il
est vrai, au temps des choix. Deøs le matin, nous sommes inviteùs aø nous reùveiller
avec la musique ou avec le "beep" de notre radio-alarm. A la terrasse dun
cafeù, nous pouvons boire aø notre gout une eau gazeuse, un jus de fruit, une bieøre ou
un Pepsi. Nous avons la possibiliteù de gagner notre bureau de travail par le moyen de
transport de notre choix. Les jours de congeù, nous pouvons eùcouter la radio, aller au
cineùma, choisir un film qui nous inteùresse, rejoindre des amis, travailler tout seul
dans la chambre etc...Devant ces possibiliteùs de choix, nos eùleøves sont pour leur
propre compte particulieørement sensibiliseùs.
Notre roâle deùducateur est de les aider aø discerner, aø hieùrarchiser, aø
choisir lattitude qui convient, devant la diversiteù et la confusion des valeurs
dans un monde pluraliste, et de ce fait, particulieørement eùprouvant.
Pratiquement, au niveau de la classe, leùducateur sattachera aø provoquer surtout les reùactions du jeune et aø former ses qualiteùs dobservation et de jugement. En ce sens, lenseignement dit profane pourra eâtre une "propeùdeutique" aø une eùducation aux valeurs. Certes, leùducation intellectuelle ne suffit pas aø former des eâtres qui sengagent, neùanmoins, elle a sa place: Nous pouvons faire pressentir la nature de la vraie liberteù qui nest pas dans lindeùpendance incontroâleùe comme le croient si spontaneùment nos adolescents, mais dans la capaciteù de reùpondre aø lappel des valeurs et dans la capaciteù de ne pas subir un destin, mais de lassumer. Cest aø leùcole surtout que la "peùdagogie du heùros" doit eâtre la preùfeùrence de leùducateur. Aider nos jeunes aø conqueùrir progressivement leur liberteù en les mettant en contact avec des personnages qui se deùprennent petit aø petit des remous de leur sensibiliteù, des fluctuations de linstant pour rejoindre la zone profonde de leur eâtre, laø ouø jaillissent la vraie liberteù et la fideùliteù.
Plus meâleùs aø la
vie adulte quautrefois, mieux informeùs de ce qui se passe dans le monde, les
jeunes actuels sont treøs sensibles aux reùaliteùs de la vie.
Notre pastorale scolaire se basera donc sur ces inteùreâts afin de fournir aø nos
jeunes des occasions de juger, de reùagir ensemble: le lancement dune fuseùe
cosmique, une intervention chirurgicale spectaculaire, une brillante performance sportive,
sont autant de sujets de conversations et de discussions, voire meâme des sujets de
dissertations orales ou eùcrites.. Les maitres trouvent laø une excellente manieøre
deùtoffer leur enseignement tout en le rattachant aø la vie courante.
Rappelons-nous que lenseignement
le plus creùateur cest celui qui, sinspirant des donneùes du programme
acadeùmique, eùclaire lavenir par des "meùdiations" sur le passeù et
le preùsent.
Les faits dactualiteùs sont aø rapprocher de tous les grands faits humains pour
mettre en valeur la courbe si eùclairante des efforts, des eùchecs et des succeøs qui
se sont succeùdeùs tout au long de lhistoire, surtout de notre Histoire du Viet
Nam, si tumultueuse mais combien riche en valeurs eùducatives!
Ainsi, lingeùniositeù, la patience, le courage sont aø eùclairer en
correùlation avec ce quils ont permis dobtenir; alors que la sottise, la
preùcipitation, la laâcheteù ou la teùmeùriteù doivent eâtre vues comme des causes
principales des insucceøs.
Bref, un eùveùnement contemporain un peu marquant dit long quand il est regardeù aø la lumieøre de ce que nous dit lhistoire sur ce que peut lhomme et sur ses limites, sur les "miracles" de sa volonteù et sur les catastrophes deùclencheùes par ses folles preùsomptions...Cest donc faire taâche eùducative que de profiter de tout ce qui alerte lopinion pour aider les jeunes aø reùagir, pour enrichir leur expeùrience et former leur jugement. Ce travil nest pas du tout du monopole du professeur de lettres ou dhistoire ou dinstruction civique; pour peu que nous ayons le souci de formation de nos eùleøves, les disciplines acadeùmiques les plus "seøches" que nous enseignons trouvent toujours des occasions de se rendre moins steùriles. En un mot, lactualiteù sera pour nous le moyen de faire discerner par nos jeunes des valeurs si menaceùes dans notre monde actuel. Notons en passant, quil est important - et cela se deùduit de la psychologie meâme des jeunes - de les aider aø distinguer le courage de la teùmeùriteù preùtentieuse, lhumble labeur de la meùdiocriteù. Nos jeunes ne sont que trop porteùs aø donner leur approbation aø tout ce qui frappe et aø leùclat (cela ne proviendrait-il pas aussi de cette mentaliteù de triomphalisme chez certains eùducateurs?), nous leur rendrons service en essayant de leur apprendre avant quils nen fassent lexpeùrience par eux-meâmes, aø faire le tri entre ce qui parait et qui est reùellement. A ce niveau, un cineù-club reùgulieørement organiseù et animeù aø leùcole, serait un excellent moyen de roâder les faculteùs dobservation, de jugement et deùvaluation des jeunes.
Mais au fil des anneùes et avec la maturation humaine, ces choix dabord appreùhendeùs par les jeunes sous leur angle le plus superficiel, exigent de leur part des options plus fondamentales: choix du meùtier, choix dun mode de vie donneù... Options qui neùcessitent aø leur tour une veùritable liberteù: la capaciteù de penser et dagir par eux-meâmes. Cest cette capaciteù que nous viserons en dernier ressort aø deùvelopper chez nos jeunes par lassouplissement progressif des structures dautoriteù, en faisant appel aø leur prise en charge personnelle: des menues responsabiliteùs de la 6e aø lauto-gestion des classe Terminales par exemple.
Au fond, il sagit laø de se servir aussi avec fruit du deùveloppement de lasolidariteù scolaire. Tout ce qui a de tout temps opposeù maitres et eùleøves (discipline, loyauteù, serviabiliteù) trouve souvent sa solution aujourdhui par la consideùration du groupe: Si les valeurs individuelles ont perdu plus ou moins leur prestige, les valeurs sociales en ont consideùrablement acquis. Rappeler lenfant au devoir de respecter lautre, de laider, de favoriser son deùveloppement ne laisse jamais leùducateur indiffeùrent. Par contre se situer par rapport aux autres est un des moyen de se promouvoir et dassumer son identiteù dans son groupe.
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